Gabon : le mouvement Liberté totale engagé dans la réinsertion des ex-détenus
Dans un climat de psychose généralisée né à la suite de la remise en liberté de nombreux détenus, le mouvement Liberté totale, conduit par un compatriote persécuté sous le régime d’Ali Bongo, a décidé de faire sienne la lutte pour la réinsertion sociale de ces gabonais. C’est dans cette optique qu’un premier contact a été établi ce 20 avril avec plusieurs jeunes du quartier Akebe, dans le 3e arrondissement de Libreville.
S’attaquer aux causes structurelles de la délinquance afin d’inverser la courbe. C’est l’objectif poursuivi par le mouvement citoyen Liberté Totale, né au lendemain de la prise du pouvoir par les Hommes en armes. Le contact avec de nombreux ex-détenus du quartier Akebe s’inscrit dans une démarche qui vise à porter devant les autorités la voix de ces personnes peu audibles.
Des ex-détenus en quête de perspectives
La rencontre de samedi entre les membres du mouvement Liberté Totale et d’anciens détenus, pour la plupart bénéficiaires de la grâce présidentielle visait à « briser le silence et à comprendre les besoins de ces jeunes » très peu audibles auprès de l’opinion et des pouvoirs publics du fait entre autres de leur parcours de vie. Un pari réussi puisque d’entrée de jeu, certains n’ont pas manqué de fustiger l’absence d’une politique post-sententielle.
« C’est l’état qui crée la délinquance », s’est insurgé Lengassibi Noel 49 ans ex détenu, qui a fréquenté la case prison pour la première fois à l’âge de 16 ans, avant de poursuivre « Jamais un plan de réinsertion n’a été mis en œuvre pour me permettre de passer à autre chose. Dieu merci je me suis battu pour sortir de cette spirale infernale mais ce n’est pas le cas pour l’écrasante majorité des gars du quartier qui sont passés par cette expérience ». Tout en saluant cette initiative, Akandji Ulrich, lui aussi ancien détenu a pointé la pauvreté comme facteur de délinquance « La pauvreté nous habite, qu’est-ce qu’on nous propose comme alternative ? Nous souhaitons le soutien de l’Etat. Depuis que le CTRI est arrivé, ils ne sont que sur les écrans et nous déplorons cela. Nous les attendons ici, qu’ils viennent voir à quoi ressemble notre quotidien », a-t-il poursuivi.
Relancer des programmes agricoles intégrant les ex-détenus
Pour sa part, après avoir brièvement exposé son parcours à « ses jeunes frères », le président du mouvement, Ndjieh Kevin, connu sous le pseudonyme Commandant Seffa, qui a été contraint à 7 années d’exile au Congo-Brazzaville du fait des persécutions du régime d’Ali Bongo, a dit partager le même diagnostic, et entend, aux côtés de ses camarades, oeuvrer en faveur d’une « véritable voie de sortie, donc à une orientation de ces jeunes vers des occupations professionnelles ».
Au titre des propositions que son mouvement entend formuler, la remise sur pied de l’Institut gabonais d’appui au développement (IGAD), afin d’orienter ces jeunes vers des projets agricoles, dans le cadre d’un parcours carcéral qu’ils veulent réussi et qui implique au premier plan les services du ministère de l’Intérieur et d’autres organes de l’Etat. Cette rencontre a également été l’occasion pour le mouvement de procéder à l’installation d’un Coordonateur en charge du quartier Akebe, qui devra travailler de concert avec ces jeunes afin de mieux les accompagner. Le Coordonateur du secteur Owendo Derrière la Pédiatrie a également été installé.
Notons que le mouvement Liberté Totale est un collectif qui fédère des jeunes de divers horizons autour des valeurs de droits de l’homme et de liberté. Il a pour ambition de dresser une passerelle avec l’ensemble des jeunes issus des quartiers désoeuvrés et qui se sentent exclus de la société. Une ambition qu’ils entendent progressivement concrétiser avec dans un premier temps une implantation au sein des quartiers du Grand Libreville, avant une ramification sur l’ensemble du pays.
