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Gabon : détournement des fonds générés par l’organisation des examens et concours ?

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Alors que le système éducatif gabonais est en lambeau avec notamment de nombreux manquements liés au déficit d’enseignants, au sous-investissement dans l’entretien des bâtiments, ou encore l’éternel problème des effectifs pléthoriques, certains services de l’Etat continuent de se distribuer les bénéfices liés aux fonds générés par l’organisation des examens et concours. C’est ce qui ressort d’un document daté du 03 mai 2024, référencé 881/MENFPFC/SG/DGOS/DI et signé du Secrétaire général du ministère de l’Education nationale, Laurent Mouity Mabika, qui présente la liste des bénéficiaires des fonds générés par l’activité des visites médicales des candidats aux examens et concours.

Fixés à 1 000 Fcfa pour les candidats issus d’établissements publics, confessionnels et reconnus d’utilité publique, à 3 000 Fcfa pour les établissements privés et les candidats libres, les frais des visites médicales représentent une manne financière importante pour l’Etat. Cette année, rien que pour le seul examen du Certificat d’études primaires (CEP), et en sous-estimant le montant payé par les candidats libres et ceux des établissements privés, ce montant a représenté plus de 50 millions de Fcfa. Si conformément à l’arrêté 00050/MENETP/MS/MBCP des ministères de l’Education nationale, de la Santé et du Budget, fixant les conditions de délivrance des certificats médicaux, la clé de répartition et les modalités de gestion des fonds générés par cette opération lors des examens et concours, ces fonds sont bien reversés au Trésor public, c’est bien l’usage qui en est fait par la suite qui interroge. En effet, cette somme colossale est partagée entre la tutelle de l’Education nationale, certains services du corps de santé, et le reste servant à l’organisation matérielle des examens.

Le contribuable gabonais dépouillé par le ministère de la santé et l’éducation nationale ?

En 2023, se sont 29 585 candidats nationaux et étrangers qui ont été enregistrés à l’examen du baccalauréat, 38112 pour le BEPC et 47764 pour le CEP. Même en alignant la part payée par les candidats d’établissements privés et les candidats libres dans la délivrance du certificat médical sur celle des candidats d’établissements publics et privés confessionnels reconnus d’utilité publique, le contribuable gabonais s’est tout de même vu dépouiller pas moins de 116 millions de Fcfa par les médecins, les paramédicaux, la tutelle du ministère de la Santé, et par la tutelle du ministère de l’Education nationale. En effet, ce document dont Gabon Media Time a pu consulter copie révèle que si seulement 25% des montants récoltés sont affectés à l’organisation matérielle des examens, 75% part tout de même dans les poches de certains individus. Une pratique choquante qui, selon une source bien renseignée de l’ancienne équipe dirigeante du ministère de la Santé, avait été stoppée net par le dernier ministre de la Santé d’Ali Bongo Ondimba.  

Si la restauration des institutions et des mentalités est un objectif visé par le CTRI au terme de la Transition, Adrien Mougougou et Camélia Ntoutoume Leclercq ne semblent pas avoir pris la mesure des enjeux. En effet, alors que les apprenants continuent de pâtir de l’absence de consommables dans les établissements scolaires, que de nombreux établissements scolaires sont toujours exposés à l’insécurité du fait d’absence de clôtures, que des sanitaires sont inutilisables au sein de certaines écoles et lycées, que le système sanitaire gabonais est toujours sous perfusion, les autorités de tutelle ne semblent pas avoir intégré dans leur stratégie l’optimisation de la dépense publique. 

En outre, en se distribuant l’argent public tels des actionnaires d’une entreprise du CAC 40, ces fonctionnaires semblent ignorer que l’enseignement est avant tout un sacerdoce qui commande des exigences d’ordre éthique et déontologique. À l’heure où des sacrifices sont demandés aux gabonais, les autorités de la Transition sont plus que jamais attendues afin de s’assurer que l’argent du contribuable soit affecté à des besoins réels, qui servent l’intérêt général. Contacté par Gabon Media Time, le cabinet du ministre de l’Education nationale nous a fait parvenir un certain nombre de documents qui confirment une telle répartition, sans que des explications soient apportées sur l’usage qui est fait de ces montants une fois distribués aux différents bénéficiaires.  

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