A La UneDerniers articlesPOLITIQUE

Référendum 2024 : l’éducation politique des citoyens, un défis pour la consolidation des processus électoraux 

Lire cet article

Le référendum constitutionnel qui a eu lieu samedi 16 novembre 2024, le premier rendez-vous démocratique post-coup d’Etat, était un pari dont l’enjeu pour les militaires était de prouver à la face du monde leur capacité à organiser un scrutin crédible, et à rendre les résultats en temps et en heure. Si aux yeux des observateurs nationaux et internationaux ce pari semble avoir été gagné, l’enjeu de la maturité politique du peuple gabonais reste cependant le principal défi à relever. 

La culture démocratique d’un Etat se mesure aussi par la capacité de ses citoyens à comprendre les enjeux d’un événement majeur qui engage la vie de la nation. Le processus référendaire organisé au Gabon, qui a vu le Oui triompher en était un. Bien que la campagne se soit déroulée dans un climat de paix et dans le respect du débat contradictoire, grâce aussi à la presse qui a su tirer son épingle du jeu en relayant aussi bien les activités des partisans du Oui que celles du Non, la question de l’achat des consciences, l’absence d’une connaissance claire du contenu du texte adopté, ont une nouvelle fois rappelé aux élites politiques le défis que représente l’éducation politique des masses partisanes dans le processus de consolidation de la démocratie et de l’Etat de droit.

Des populations votant sans réelle compréhension des enjeux 

Dans toutes les démocraties du monde, les partis politiques et les organisations de la société civile sont des espaces de socialisation politique des citoyens. Ils ont pour rôle, certes d’animer le débat public, mais doivent avant tout offrir à leurs membres des outils d’émancipation politique, à travers des échanges sur des questions qui clivent. Si le débat sur la Constitution était une occasion pour les partis politiques de se réinventer en permettant aux gabonais d’être mieux informés sur le contenu du texte et en défendant avec conviction leur positionnement, le cynisme politique a une fois encore pris le dessus sur l’intérêt général. Le rétropédalage de plusieurs formations politiques qui, au détour d’une audience qui leur a été accordée par le président de la Transition, ont renoncé à leurs convictions de voter Non lors du référendum, en est une preuve palpable.

Ce manque de conviction politique a d’ailleurs grandement contribué à fausser le débat autour de cette question référendaire, quand bien même cruciale pour l’avenir de la nation. En effet, de nombreux compatriotes ont volontairement été maintenus dans une forme d’ignorance, certains acteurs politiques emprunts de cynisme, préférant entretenir une confusion entre le vote de la Constitution et le soutien au président Oligui Nguema. Or, la grandeur politique et l’esprit civique, auraient voulu que ces derniers, plutôt que d’investir dans la distribution des billets de banques, dont on ignore au passage la provenance, multiplient des exemplaires de ce qui était encore un projet de Constitution, et les distribuent aux populations à l’occasion de chacune de leurs réunions publiques afin que chaque citoyen s’en imprègne. 

« Lorsque j’ai mené campagne dans la Nyanga, des compatriotes m’ont dit, les autres ont donné des T-Shirts, mais vous, que donnez-vous ? », a par exemple déploré le professeur Alain Mouagouadi, partisan du Non au référendum, lors de son passage dans l’émission Le Débat de Gabon Media Time le 19 novembre. Lequel a en outre fait état de compatriotes qui ont affirmé ne pas avoir lu le texte de la Constitution. Ces remontées de terrain permettent de mettre à nu les limites de l’appareil étatique qui n’a pas su rendre accessible à tous le contenu du texte pour lequel les gabonais se sont déplacés aux urnes. La campagne de sensibilisation au référendum menée plusieurs jours durant par le ministère de l’Intérieur sur l’ensemble du territoire et à l’étranger, aurait pourtant pu être le cadre idéal pour que l’Etat fasse connaître le texte aux gabonais. 

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page