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Jean-Pierre Ndoungou Lekambo : «Nous sommes isolés de tout le pays»

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L’éboulement survenu dans la nuit du 28 au 29 avril dernier sur la route départementale qui  relie Mbigou à Lebamba, au niveau de Ndenga, à une vingtaine de kilomètres du chef-lieu du département de la Boumi-Louetsi dans la province de la Ngounié n’a pas laissé insensible l’ancien sénateur Jean-Pierre Ndoungou Lekambo. Dans cet entretien accordé à Gabon Media Time, ce notable de la localité revient longuement sur les difficultés vécues par les populations et l’abandon dont elles sont victimes de la part des pouvoirs publics. Lecture.

Gabon Media Time: Qu’est-ce que les populations traversent actuellement ?

Jean-Pierre Ndoungou Lekambo: Nous sommes isolés de tout le pays puisque l’axe Mbigou-Mimongo est impraticable. Tous les ponts sont cassés depuis longtemps. L’axe Mbigou-Malinga aussi n’a plus de ponts et la seule issue de secours qui nous restait, c’était Mbigou-Lebamba. Mais, il y a pratiquement une semaine, à 20km de Mbigou au village Ndenga, il y a eu un effondrement. Et depuis lors, les gouvernants ne font aucun signe de vie. Il y a un proverbe qui dit que « lorsque tu as deux femmes, on ne s’occupe pas de celle qui ne fait pas de bruit ». C’est le cas de Mbigou. Mbigou ne fait jamais de bruit. Mbigou vote toujours pour le PDG. Mbigou a des élus du PDG. Donc c’est normal que les gouvernants ne fassent aucun signe de vie. 

Aujourd’hui, nous sommes coupés du reste du monde. Il n’y a plus de riz, les derniers sacs chez les commerçants sont en train de se vider. Le gasoil, il n’y en a plus. CECADO pour ceux qui boivent la Regab, les dernières bières ont été enlevées hier.S’il y a un incident plus grave comme ce qui  nous est arrivé le 28 avril dernier, un jeune s’est noyé et le corps n’a été retrouvé que le lundi 1er mai autour de 19h. Lorsque CASEPGA est arrivé chercher le corps, il a fallu le porter à travers la boue pour traverser l’éboulement. Ce sont des jeunes qui ont fait acte de bravoure pour soulever le cadavre pour mettre dans le corbillard de CASEPGA pour qu’il soit conservé à Mouila.

Nous sommes abandonnés à nous-mêmes. On ne sait pas qu’est-ce que la population de Mbigou a fait au pouvoir après l’avoir encensé. Omar Bongo Ondimba, le père du président actuel a été encensé à Mbigou, lui-même Ali Bongo Ondimba, son fils n’en parlons même pas. Bon et c’est ça la République.

Quel est désormais le sentiment qui anime ces populations à quelques mois seulement des joutes électorales notamment la présidentielle, les législatives et les locales? Lorsque vous regardez un peu la population, quel est le sentiment même qui anime ces dernières ?

Qu’est-ce que les gens de Mbigou vont dire? Elles sont habituées. Cela fait très longtemps qu’elles sont pratiquement abandonnées à elles-mêmes. Il est aujourd’hui impossible d’aller à Malinga ou à Mimongo. Il est impossible d’aller à 20km de Mbigou parce que tous les ponts sont cassés. Bon qu’est-ce que vous voulez que les populations disent? Elles n’attendent que les élections et la réaction c’est à travers elles que le parti au pouvoir les verra. Lorsqu’on parle ici il y a certaines personnes  qui ont eu les prérogatives du fait de leur mandat électif qui se croient plus grandes que les autres et qui boudent et tout et tout.

 L’ancien sénateur Jean-Pierre Ndoungou Lekambo s’indigne de l’état des voiries de Mbigou

Regardez les voiries de Mbigou, elles sont complètement défoncées. Le gouvernement trouve utile que sur un rayon de 30.5km de route à travers Mbigou, il ne donne que 1.5 km de pavés ?  Et vous savez que les pavés à Mbigou ce n’est pas quelque chose qui tiendra parce que la zone est très pluvieuse et au moment où je vous parle, la pluie est presque en train de tomber.

Donc pour les populations, l’heure est désormais à la sanction lors des prochaines joutes électorales ? 

C’est sûr, les populations attendent le jour- J. Tout ce que je sais c’est que  même la fameuse révision de la liste électorale je ne sais pas comment elle va se faire s’ils ne libèrent pas le tas de terre qui empêche qu’on arrive à Mbigou. Il faut noter qu’il n’y a qu’à Mbigou centre que la liste électorale sera révisée parce qu’on ne pourra pas aller plus loin que ça à moins que les pouvoirs envoient des hélicoptères pour atterrir dans les villages. Voilà c’est tout ce que je peux dire. 

Ils ont envoyé une entreprise KRTP qui n’a pas de moyens pour faire des pavés à Mbigou. Ils n’ont qu’un véhicule de type pick-up et une camionnette. La fameuse entreprise qui est venue placer les pavés n’utilise que du matériel de la subdivision des travaux publics. Elle n’utilise que la main-d’œuvre des travaux publics alors qu’il y a des jeunes chômeurs qui attendent d’être employés. 

Si vous me permettez, vénérable, justement vous avez mentionné la contribution des travaux publics il y a seulement quelques jours le ministre des Travaux publics Toussaint Nkouma Emana a été reconduit à ce poste. Est-ce qu’il daigne quand même s’enquérir de la situation dans laquelle les populations de Mbigou vivent actuellement?

Mais ce Toussaint Nkouma Emana n’a jamais fait le tour du propriétaire parce que quand un ministre des Travaux publics est nommé, il doit faire le tour du propriétaire. Donc il doit voyager. Il doit même descendre dans le Gabon profond. Monsieur Nkouma Emana ne se contente que du goudron de chez lui à Lambaréné.  Il s’arrête là et puis il retourne à Libreville. Mais il ne sait pas que le Gabon ne se limite pas chez lui. Le Gabon va jusqu’ à Mbigou, jusqu’à Malinga et même à Mimongo, à Etéké et j’en passe et voilà c’est ce que je peux dire. 

LIRE AUSSI: Gabon: le calvaire des populations continue sur l’axe Lebamba-Mbigou

Bon lui il ne sait même pas que ça base de Travaux publics à Mbigou n’est plus qu’une coquille vide et que le peu d’engins qu’il y a à Mouila quand ils descendent ici c’est pour sous-traiter avec les entreprises qui ont eu le marché. Donc les engins des Travaux publics sont loués par des entreprises qui viennent par exemple placer les pavés.

Les populations de Mbigou croyaient qu’une telle entreprise en arrivant dans la localité devait embaucher les jeunes qui sont sans emplois mais elle préfère encore prendre de la main d’œuvre  déjà salariée des Travaux publics. C’est vraiment curieux. 

Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter ? 

Les habitants de la Boumi-Louetsi oubliées, personne ne peut dire le contraire. Vous ne pouvez pas vous amuser à laisser une population une semaine coupée des autres localités du pays, ce n’est pas possible. Après 48h au maximum de travaux, la route devrait être libérée. C’est ça la notion de travaux publics. mais là on va atteindre la deuxième semaine. On ne peut pas sortir de Mbigou, aller à Lebamba, à Mimongo et à Malinga est impossible.

Vous savez pratiquement que Mbigou ne vit qu’avec Lebamba et quand cette route-là est coupée nous on ne peut plus vivre. Heureusement que dans le barrage, il y a des turbines qui semblent marcher. Mais les 10 000 litres de gasoil que la SEEG a reçus sont déjà terminés. Et puisqu’il pleut beaucoup, le barrage n’arrive pas à contenir trop d’eau donc on utilise le groupe et le groupe à présent n’a pratiquement plus assez de gasoil, je crois. Voilà.

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