Gabon : La saison sèche, période propice au « Kwanza » ?

Avec l’arrivée de la saison sèche au Gabon, un phénomène récurrent refait surface : l’engouement pour les produits éclaircissants, communément appelé « Kwanza ». Le climat plus frais, l’absence de pluies et la baisse de l’humidité offrent des conditions jugées idéales par les adeptes de ces produits, malgré les campagnes de sensibilisation sur leurs dangers.
Dans les salons de beauté de Libreville ou sur les étals des marchés, crèmes, gels et laits éclaircissants séduisent, particulièrement les jeunes femmes. « C’est le bon moment, sans soleil ni transpiration excessive, la peau réagit mieux », explique une esthéticienne de Nzeng-Ayong. Ce discours, largement partagé, reflète une pratique ancrée, bien que controversée. Le « Kwanza » dépasse le cadre d’une simple routine esthétique.
Entre nécessité d’esthétique et urgence sanitaire !
La propagation de la dépigmentation soulève des enjeux de santé publique et des questions identitaires complexes. Les risques cutanés sont entre autres les infections, les cancers de la peau et les troubles pigmentaires. Pourtant la dépigmentation volontaire reste populaire. Sur les réseaux sociaux comme TikTok, Instagram ou Facebook, des influenceuses partagent leurs routines « claire-peau », vantant savons, sérums ou mélanges artisanaux, souvent sans expertise dermatologique.
Ces publications, parfois suivies par des milliers de personnes, amplifient le phénomène, surtout pendant la saison sèche, perçue comme optimale pour ces pratiques. Mais pourquoi cette quête d’un teint plus clair persiste-t-elle ? Au-delà de l’esthétique, elle traduit une pression sociale et culturelle profondément enracinée. Dans l’imaginaire collectif gabonais, la peau claire est encore associée à la beauté, à la réussite sociale, voire à un statut supérieur. Ces perceptions, héritées de standards occidentaux et renforcées par les médias, les publicités et certains milieux professionnels, continuent d’influencer les choix individuels.
Dans un pays où le sujet oscille entre tabou et banalisation, les campagnes de sensibilisation peinent à contrer ces normes. Pour lutter contre les dangers du « Kwanza », les autorités et dermatologues appellent à une prise de conscience collective. Ils plaident pour une meilleure régulation des produits éclaircissants, souvent vendus sans contrôle, et pour des campagnes éducatives valorisant la diversité des teints. En saison sèche, période où le phénomène s’intensifie, l’urgence est de promouvoir une beauté inclusive, libérée des stéréotypes.
Ruth Ibouili
GMT TV