Pétrole : plus de 18 milliards investis par la Sogara en 2023 pour un résultat inexistant
Au terme de l’exercice 2024, l’activité de raffinage a enregistré des résultats mitigés. Comme le rapporte le ministère de l’économie dans son tableau de bord, la Sogara, unique opérateur dans ce segment, n’a traité que 666124 tonnes métriques de brut contre 998 896 tonnes métriques en 2022, soit une baisse de 33,3%, entraînant une augmentation substantielle de 42,3% des importations de brut traité, qui s’est située à 491 014 tonnes métriques. Dans ce contexte, les résultats commerciaux ont également été contrastés, ce qui a conduit la société à privilégier la solution investissements. Ce sont donc 18,436 milliards de FCFA qui ont été investis en 2023, en hausse de 248,2% en glissement annuel.
Complexité opérationnelle, sécurité et sûreté, normes environnementales, économie et rentabilité, technologie et innovation, gestion des risques, les défis d’une raffinerie sont multiples de nos jours. Pour le cas du Gabon et de la société gabonaise de raffinage, le défi est d’autant plus important. Sogara doit désormais s’arrimer aux normes d’aujourd’hui tout en tenant compte de son histoire vieille de 60 ans d’une part et de la volonté des autorités de reprendre la main sur l’industrie pétrolière de l’autre. Une volonté des autorités marquée par le rachat d’Assala ces dernières semaines, mais qui peine à se concrétiser de manière globale, au regard des difficultés structurelles de la seule et unique raffinerie du pays.
En effet, comme la grande majorité sinon la totalité des établissements publics gabonais, la société gabonaise de raffinage sort de plusieurs exercices déficitaires, même si en 2021 on notait un résultat net d’un peu plus de 1,2 milliard de FCFA. S’il était un temps évoqué une possible reprise de son outil productif par le secteur privé, ce qui aurait constitué le point de départ d’une nouvelle stratégie, il n’en a finalement rien été. Pour tenter d’éviter la d’un prolongement indéfini de sa structure financière, elle a entrepris d’investir en 2023, dans l’achat de machines et des pièces de rechange, une somme dépassant les 18 milliards de FCFA, comme le souligne le tableau de bord de l’économie 2023.
Un investissement en hausse de près de 250% en glissement annuel, mais pour quel résultat ?
En hausse de 248,2%, cet investissement a certes permis au cours du premier trimestre 2024, d’améliorer le niveau de production qui selon la note de conjoncture sectorielle à fin mars a très fortement progressé (+252,4%), consécutivement à la reprise d’activité après l’arrêt quinquennal observé l’an dernier et l’avarie qui a eu le réacteur d’hydrotraitement, mais il est loin de répondre aux besoins structurels de cette entité dont les effectifs se sont relevés de 3,8% à 352 agents correspondant à une masse salariale de 20,6 milliards de FCFA. Plus de 20 milliards de FCFA de masse salariale qui correspondent à une moyenne de plus de 58 millions de FCFA de revenus par agent en 2023, le tout pour une société qui peine à assurer sa mission première.
Avec une capacité de production de l’ordre de 1,2 million de tonnes métriques par an qui peine ne serait-ce qu’à être atteinte, le rachat d’Assala qui devrait augmenter la part de brut produit par l’Etat gabonais et donc potentiellement celui qu’elle devra traiter, la société gabonaise de raffinage devra très rapidement s’adapter pour répondre à une demande croissante et multisectorielle si l’on tient compte de la reprise des vols domestiques made in Gabon induite par la création de Fly Gabon. Pour cela, une stratégie ciblée ou une restructuration profonde devront être envisagées pour qu’elle sorte enfin de l’ornière, et cesse définitivement de n’être qu’un gouffre à sous et une variable d’ajustements.