Gabon : 53 ans après sa naissance, le PDG exerce-t-il le pouvoir pour le bien du peuple?
Depuis sa création, le 12 mars 1968, le Parti Démocratique Gabonais (PDG) s’est imposé comme l’unique parti de gouvernement au sein du système politique gabonais. Souvent divisé en son sein et malmené par l’opposition, c’est au prix du réalisme politique que le parti parvient toujours à conserver le pouvoir. 53 ans après sa création, quel bilan peut-t-on dresser de l’apport de ce parti dans le développement du pays et la construction de notre nation ?
Le PDG est assurément une organisation dont l’espérance de vie politique est supérieure à celle de nombreux de ses dirigeants en place. Plus vieux parti en exercice au Gabon, il a vécu plusieurs moments politiques. Les deux premiers sont celui du parti unique (1968-1990) et du « Renouveau démocratique » (1990-2009) sous Omar Bongo Ondimba. Le troisième est celui de la transition politique sans fin (depuis 2009) sous Ali Bongo Ondimba. Pour mieux comprendre le PDG, 53 ans après sa création, nous aurions pu nous donner pour ambition de cerner les contours de sa vie historique, juridique, idéologique et sociologique.
Cependant, ce 53e anniversaire arrive à un moment où le PDG connaît de fortes similitudes avec son état dans les années 1990 : une gouvernance illisible et fortement remise en cause par les forces sociales, des victoires à la Pyrrhus à chaque élection présidentielle, une nécessité de repenser son logiciel idéologique, un leadership naturel contesté en sourdine, et un débat sur le « que faire ? » du pouvoir absolu que le parti détient depuis des décennies.
Le PDG reste le parti dominant de la vie politique gabonaise. Il demeure une machine politique qui a construit de solides fondements dans ce pays. C’est aussi l’organisation politique nationale la mieux implantée localement. A chaque élection, le parti propose des candidats dans toutes les circonscriptions et sur tous les sièges.
Parti de masse et de certaines élites, le PDG doit pour autant se tourner vers l’avenir .et tirer la leçon des nombreuses crises récemment vécues en son sein et par notre pays. En tant que parti majoritaire, chacun de ses membres dirigeants et influents peut se demander quelle est sa part de responsabilité.
53 ans après, le PDG a-t-il un problème de compatibilité avec la démocratie ? En effet, les partis politiques sont censés contribuer à la satisfaction de l’intérêt général en ce qu’ils influencent, orientent, guident l’opinion grâce aux débats qu’ils provoquent. Sauf qu’au PDG le débat est (quasiment ?) inexistant. La démocratie à l’intérieur du parti est presque impossible. C’est le président du parti qui décide de tout et donne les orientations. Les militants sont des machines à exécuter les ordres du chef. D’ailleurs, on attend d’eux qu’ils soient « bêtes et disciplinés », pour reprendre l’ancien Secrétaire général Faustin Boukoubi.
Faute d’une véritable idéologie, le parti navigue à vue dans ses choix de gouvernance et dans les débats de société. Sur la scène médiatique, face à leurs adversaires, les Pédégistes s’expriment trop souvent par médias interposés. Ils raffolent des monologues et craignent la contradiction que peut apporter le dialogue.
Surabondamment, le Parlement, où ils ont toujours obtenu la majorité absolue, a été transformé en chambre d’enregistrement et de validation de la volonté politique de l’exécutif par les députés PDG. Ces derniers n’exercent d’ailleurs aucun véritable contrôle de l’action gouvernementale.
En 2021, le PDG répond-il aux aspirations de la société gabonaise ? Aujourd’hui, et depuis de trop nombreuses années, le PDG est à bout de souffle, dans ce qu’il propose aux Gabonais. Le parti n’a jamais été perçu comme la force qui peut porter l’espoir et l’espérance des classes populaires et moyennes.
Face à la profonde mutation silencieuse et visible de la société gabonaise, il n’a pas su répondre efficacement aux défis actuels qui bousculent toute notre société et nos vies. Le PDG a l’obligation de répondre aux nouveaux défis dans un Gabon fracturé et une nation menacée. Les choix stratégiques des gouvernements, issus de ses rangs, n’épousent que rarement les priorités des Gabonais ; à savoir : la santé, le logement, l’accès à l’eau potable, à l’éducation, à l’emploi et les transports.
Le PDG est victime de son hégémonie sans partage. Impliqué dans une volonté délibérée de conserver le pouvoir, le parti ne l’exerce plus pour le bien des Gabonais. Ces derniers sont las des détournements chroniques des deniers publics, de l’impunité galopante et des inégalités croissantes. Le parti est devenu une sorte d’entreprise politique dont on se sert pour la conquête individuelle de privilège et pour le partage des dividendes politiques.
Aujourd’hui, à 53 ans, le PDG ressemble à un parti clanique, replié sur lui-même, qui sanctionne et exclut à tour de bras quiconque émet un son différent, un parti vidé de sa substance, réduit à satisfaire uniquement les ambitions d’un clan qui ne semble plus très en phase avec les réalités de son pays.
Joyeux anniversaire quand même !