Gabon : l’inquiétante absence du classement des 20 pays africains les plus performants

Alors que Jeune Afrique vient de publier son classement des 20 pays africains les plus performants en matière de gouvernance, d’influence et d’innovation, le Gabon brille par son absence. Un signal d’alerte fort sur la fragilité structurelle du pays et sur l’urgence de réformes profondes pour redorer son image à l’international.

À travers un classement rigoureusement élaboré par Jeune Afrique Intelligence Unit, l’Afrique du Sud, l’Égypte, le Maroc ou encore le Botswana se distinguent comme les locomotives du continent en matière de gouvernance, d’innovation et d’influence. Ces trois dimensions, pondérées respectivement à 50 %, 25 % et 25 %, intègrent une batterie de 25 indicateurs, allant de l’État de droit à la diplomatie, en passant par la qualité du système éducatif. L’absence du Gabon dans ce palmarès interroge. Pis, elle inquiète.

La première faille, et probablement la plus déterminante, se situe au niveau de la gouvernance. Ce critère, qui représente à lui seul la moitié de la note finale, prend en compte des données aussi capitales que la croissance du PIB par habitant, la stabilité institutionnelle ou encore la perception de la corruption. Or, le Gabon, malgré la transition en cours depuis le 30 août 2023 et qui prendra fin avec le renouvellement de toutes les institutions, continue de payer le prix d’un lourd héritage institutionnel. L’absence de transparence, les lenteurs dans la mise en œuvre des réformes, et surtout, l’incertitude juridique post-putsch ont probablement contribué à le disqualifier d’entrée.

Le fait que les pays ayant connu un coup d’État récemment soient pénalisés dans l’indice « Rule of law » n’a rien arrangé. En clair, l’État de droit demeure encore un chantier, et les engagements politiques, bien que positifs, tardent à se traduire en indicateurs mesurables.

Faible rayonnement et retard structurel en innovation

Autre zone d’ombre : l’influence régionale et internationale du Gabon reste marginale. Là où des pays comme le Maroc ou l’Égypte capitalisent sur une diplomatie dynamique et un soft power culturel affirmé, le Gabon, replié sur ses préoccupations internes, n’a pas su déployer une stratégie de visibilité à la hauteur de ses ambitions. Le pays est absent des grandes enceintes diplomatiques africaines, ne se distingue ni par son nombre d’ambassades, ni par sa contribution aux opérations de maintien de la paix.

Côté innovation, le constat est tout aussi préoccupant. Faible nombre de brevets, système éducatif en berne, start-up peu financées, qualité d’instruction déficiente : l’écosystème gabonais peine à produire des indicateurs compatibles avec la nouvelle dynamique continentale. L’absence de levées de fonds significatives ou de programmes structurants d’éducation et de recherche pèse lourdement.

Le Gabon à l’épreuve de sa propre reconstruction

L’absence du Gabon dans ce classement n’est pas seulement une déception. C’est une alerte. Le pays, qui aspire à un redressement républicain et économique, doit urgemment se doter d’une stratégie cohérente et mesurable dans ces trois domaines clés. Gouvernance, influence, innovation : tels sont les piliers qui conditionneront sa crédibilité future.

Il ne suffit plus d’annoncer des réformes. Il faut produire des résultats, visibles, quantifiables, internationalement lisibles. Le président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguema, a une opportunité historique d’inverser la tendance. Mais cette opportunité a une exigence : bâtir un État qui inspire confiance, qui rayonne, et qui innove. Le classement de Jeune Afrique est un miroir. Le Gabon ne s’y reflète pas encore. Mais il n’est pas trop tard pour s’y faire une place. À condition de faire des choix courageux et durables.