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Gabon : le spectre d’une reproduction sociale des élites ?

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Présentée aux yeux de la communauté internationale comme une occasion de mettre un terme aux injustices et autres dérives décriées depuis des dizaines d’années, la transition semble se fourvoyer dans une reproduction des errements du passé. C’est notamment le triste constat qui pourrait être dressé au gré des nominations qui se sont succédées au sein de l’administration, au point que le spectre d’une reproduction sociale des élites plane plus que jamais sur le pays. 

Le gel des recrutements dans la fonction publique a sacrifié plus de 5 générations de Gabonais hautement diplômés. Si beaucoup de ces compatriotes ont vécu le coup d’État comme un espoir de voir la compétence primer sur le clientélisme, ils ne peuvent que constater l’impuissance du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) face à ces pratiques bien rodées, qui sont perceptibles au sein de nombreux cabinets ministériels. 

Les mêmes familles aux mêmes places et des milliers de diplômés sacrifiés 

A chacun de ses déplacements, le président de la Transition, le Gén. Brice Clotaire Oligui Nguema s’auto-satisfait d’avoir pioché des compétences à l’étranger, qu’il a ensuite nommées à des postes de responsabilité au sein de la haute administration. S’il faut de manière objective le lui reconnaître, cette dynamique n’a nullement tenu compte du critère social, qui aurait permis à des milliers de diplômés d’accéder à des responsabilités, non pas pour avoir fait de l’activisme, mais pour avoir sacrifié des heures entières pour obtenir des diplômes, en dépit des difficiles conditions d’apprentissage au Gabon. 

Au détour d’un échange informel, en lien avec ces nombreuses nominations aux relents clientélistes, de pantouflage et de népotisme, une compatriote, qui a brillamment obtenu ses diplômes dans une université française confiait « Si j’avais su cinq ans à l’avance que pour être nommé au Gabon il suffisait de faire de l’activisme tous les samedis au Trocadéro, je n’aurais pas passé des nuits blanches à bosser comme une malade pour tenter d’obtenir mes diplômes. Mais j’ai bon espoir qu’un jour les choses changeront vraiment ». Une déception que ne sont pas loin de partager ces milliers de compatriotes, dont les dossiers déposés en catimini au sein des différents secrétariats généraux des ministères, du fait de l’amateurisme d’une administration en manque d’inspiration, croupissent encore dans les placards.  

Il n’est jamais trop tard pour corriger des injustices sources de frustrations 

Si à neuf mois de la transition, le chemin parcouru est à certains égards à saluer, notamment en ce qui concerne le retour progressif du Gabon dans le concert des nations, les injustices, sources de frustrations, pourraient à terme compromettre le fragile équilibre social, que la popularité du CTRI et son chef parvient encore à contenir. Si les nombreuses nominations de proches, et des mêmes familles connues, alimentent la thèse d’une reproduction sociale des élites, le CTRI gagnerait à se départir de cette complaisance, au risque que les frustrations de ces milliers de diplômés du supérieur, que le système a progressivement transformés en travailleurs sous-qualifiés, ne brisent ce rêve d’un essor vers la félicitée. 


En effet, loin de remettre en question les aptitudes des uns et des autres à occuper des fonctions de conseillers, de chargés de missions, de chargés en communication, de directeurs, de PCA, de délégués spéciaux, de chauffeurs, de parlementaires, de femme de ménage etc, la morale du moment et les raisons qui ont donné lieu à la mise à plat du système institutionnel du pays, auraient commandé la mise en place d’un mécanisme de détection des compétences plus élaboré, et qui tienne compte de plusieurs critères, y compris les milieux sociaux. Toute chose qui aurait permis de voir émerger, à l’issue du processus de transition, un parterre composite d’intellectuels, et pas seulement les descendants d’une caste de privilégiés, soucieux de maintenir cet état de fait.

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