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Gabon : posture de défiance du DGBFiP vis-à-vis du gouvernement ?

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Depuis sa sortie de piste du 25 mai dernier en marge des festivités marquant la célébration du travail, le Directeur général du Budget et des Finances publiques (DGBFiP), campe sur ses positions. Malgré les sorties successives des secrétaires généraux des Comptes publics et de l’Économie le rappelant à l’ordre, aucune prise de parole visant à clarifier ses propos, semble-t-il, « sortis de leur contexte » comme l’évoquaient certains de nos confrères. Tendancieux, ces propos qui évoquaient sans détours « l’augmentation de primes à la performance budgétaire », sont pourtant, aujourd’hui, toujours aussi controversés et la position d’Aurélien Mintsa Mi Nguema, toujours aussi défiante. 

« Récompenser la performance individuelle et le rendement collectif produits dans le cadre des objectifs des recettes budgétaires assignés chaque année par la loi de Finances ». Tel est l’objet principal de la Prime à la performance budgétaire (PPB). Destinée à une caste d’agents publics affiliés aux régies financières, cette PPB instituée en 2020 et légèrement modifiée en 2022, devait pourtant remettre de l’ordre dans le capharnaüm des fonds communs. Quatre ans plus tard, elle n’a fait que déplacer le problème sans le résoudre, créant une nouvelle élite d’un peu plus de 3000 agents dans l’administration qui, à eux seuls, ponctionnent à l’Etat pas moins de 24 milliards de FCFA par an. 

Si cette question fait aujourd’hui tant débat, c’est en grande partie à cause des récents propos de l’actuel Directeur général du Budget et des Finances publiques. En promettant une « augmentation de la prime à la performance budgétaire » alors même que cette question n’est pas de son ressort, mais plutôt de celui de la « commission bipartite administrations-syndicats  des régies financières et administrations assimilées (…) seule compétente pour se prononcer sur les questions liées au versement de la prime PPB » comme l’ont rappelé les secrétaires généraux de l’Economie et des Comptes publics et même l’intersyndicale des Régies financières et Administrations assimilées (IRFAA), Aurélien Mintsa Mi Nguema, a clairement outrepassé son rôle.

Une posture de défiance visàvis de sa hiérarchie qui crée des tensions

Cette annonce qui « s’apparente à une dangereuse sortie de piste doublée d’une attitude de défiance » comme l’a souligné un haut responsable du trésor public cité par nos confrères de l’Union et soutenue avec véhémence par l’IRFAA dans la foulée, en remet une couche sur la nécessité même de réformer cette question des primes aux agents des régies financières, à l’heure de la transition. Une question d’autant plus pertinente que les administrateurs du Fonds monétaire international (FMI) viennent dans leur dernier rapport au titre des consultations de l’article IV, « l’urgence d’un assainissement budgétaire décisif pour garantir la viabilité budgétaire, tout en préservant la capacité de répondre aux importants besoins sociaux et de développement ». 

Les agents comptables et autres agents des régies financières appelés à respecter leur serment

La réforme de l’Etat dans le but de le rendre plus efficace, qui devrait coûter aux contribuables pas moins de 220 milliards de FCFA sur les trois prochaines années, devrait s’interroger sur cette question.  L’application pure et simple des principes de bonne gestion et de discipline budgétaire, à laquelle sont censées être astreints les agents des régies financières qui sont les premiers à manipuler les deniers publics, ne doit plus nécessairement être conditionné par le versement d’une prime et ce, eu égard aux performances de la dépense de ces dernières années. Le serment que prêtent plusieurs de ces agents qui jurent « de servir l’État avec fidélité, de remplir avec probité et de “se” conformer aux lois et règlements qui ont pour objet d’assurer l’inviolabilité et le bon emploi des deniers publics », devrait d’ailleurs les conduire à plus de retenue. 

« Ce serment qui n’est pas une simple formalité, qui ne doit pas être prêté à la légère et qui engage et oblige à la fois devant la Cour des comptes, mais également devant la Nation tout entière » comme le rappelait récemment Alain-Christian Iyangui, premier président de la Cour des Comptes, lors de la prestation de serment des 37 nouveaux agents comptables et à laquelle participait d’ailleurs l’actuel DGBFiP, doit être replacé au cœur de leur action. C’est par celà aussi que passe la transition et le changement de paradigme tant attendu. Que l’Intersyndicale ne sorte pas uniquement lorsqu’on évoque, sans même y toucher, la PPB, mais qu’elle se prononce également sur des questions de gestion, voire de mauvaise gestion de la chose publique. 

Casimir Mapiya

« Mieux vaut une vérité qui fait mal, qu'un mensonge qui réjouit. » Proverbes berbères

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