Gabon : la hausse du SMIG au fond du tiroir du gouvernement
Au Gabon, au cours des deux dernières décennies, « il y a eu un recul du niveau de revenu. Pour vous donner un exemple, au Gabon, si un habitant gagnait 100 000 FCFA en 1990, aujourd’hui, ce même habitant gagne à peine 80 000 FCFA ». C’est ce que rappelait Gomez Agou, représentant résident du FMI il y a quelques semaines au détour d’une conférence de presse. Cette analyse tient compte à la fois du niveau du salaire minimum garanti et du niveau actuel d’inflation. Dans d’autres pays où de tels faits ont été constatés, l’État a pris ses responsabilités en œuvrant pour l’augmentation généralisée des salaires dans le secteur privé, aboutissant à une revalorisation du salaire minimum garanti. Au Gabon, ce dossier semble au fond du tiroir du gouvernement.
A l’image de l’allocation chômage qui représenterait un ouf de soulagement aussi bien pour les chômeurs que pour les personnes en perte d’emplois, l’augmentation du Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG), représenterait également un enjeu crucial et un indicateur de développement pour le Gabon. Il faut dire que l’un comme l’autre, sont capables de répondre à la problématique de réduction de la pauvreté, qui concerne ⅓ de la population gabonaise. A titre d’exemple, une augmentation du SMIG pourrait réduire les écarts de revenus et améliorer le niveau de vie des travailleurs les moins bien rémunérés.
Les travailleurs touchés par une potentielle hausse du SMIG, pourraient avoir plus de pouvoir d’achat, ce qui aurait la capacité de stimuler la consommation intérieure et ainsi redynamiser l’économie nationale, toujours fortement dépendante des revenus issus des industries extractives. Pour montrer à quel point le sujet est d’importance, on peut s’appuyer sur les récents propos de Gomez Agou, représentant résident du FMI. Ce dernier au détour d’une conférence de presse présentant les défis de l’économie gabonaise, soulignait « qu’il y a eu un recul du niveau de revenu. Pour vous donner un exemple, au Gabon, si un habitant gagnait 100 000 FCFA en 1990, aujourd’hui, ce même habitant gagne à peine 80 000 FCFA ».
Réduction de la pauvreté et du chômage
Plus loin dans son analyse tirée des données du Fonds, il a insisté sur le fait que « ce recul du revenu s’est accompagné de deux éléments importants au Gabon : l’accroissement du chômage et l’accroissement de la pauvreté. Le chômage, aujourd’hui, est autour de 35 à 40% au sein de la population en âge de travailler. Et la pauvreté, c’est un Gabonais sur trois qui est pauvre ». Une situation bien connue donc, mais à laquelle les gouvernements successifs semblent incapables d’apporter des solutions. Un sujet qui replace donc la question de la hausse du SMIG au cœur des débats. Certes, le Gabon a le niveau de SMIG le plus élevé de la zone franc avec 80 000 FCFA, mais en le concevant il semble y avoir eu quelques couacs, qui nécessitent des ajustements. Il ne s’agit pas de traiter la question de façon cavalière et populiste comme c’est souvent le cas, mais plutôt de manière structurée.
Au Sénégal par exemple, un pays bien connu du président de la transition, entre 2018 et 2023, il y a eu deux augmentations du SMIG, le faisant passer de 58 900 FCFA à 64 223 FCFA suite d’un consensus pour l’augmentation généralisée des salaires dans le secteur privé. Un moyen de lutter contre l’inflation. Au Maroc, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Bénin, au Togo, le SMIG a également connu une revalorisation. Bien que ces hausses du SMIG restent sur des montants inférieures à celui du Gabon, elles ont le mérite d’exister et doper la croissance de ces pays, étant entendu qu’une hausse du SMIG entraîne très souvent des incitations à l’efficacité des salariés.
Dans un contexte où l’exécutif multiplie les promesses populistes, renforce le niveau de subventions qui se sont élevées à 12 milliards de FCFA pour le seul mois de mai en intégrant le gaz, les carburants et le dispositif de défiscalisation mercuriale, a rétabli le paiement de la bourse au secondaire sans aucune réelle nécessité pour un montant annuel de 12 milliards de FCFA également, il est étonnant que cette question de la revalorisation du SMIG reste au fond du tiroir, tout comme celle de l’allocation chômage. Certes, une hausse du SMIG pourrait augmenter les coûts de main-d’œuvre pour les entreprises, entraîner une augmentation des prix des biens de consommation, conduire à des suppressions d’emplois, mais, bien calibrée, elle pourrait améliorer les conditions de vie des ménages et réduire les inégalités, pour peu qu’elle se concentre sur ces travailleurs qui en ont réellement besoin, et non sur un ensemble comme c’est le cas pour les subventions aux carburants qui ne profitent au final, qu’aux plus nantis.