Rachat d’Assala : après le défi de l’acquisition, place désormais à celui de la gestion !
L’Etat gabonais peut-il envisager le rachat de la compagnie pétrolière Assala, malgré une dette représentant 70,5% de son PIB? C’était la grande question au moment de l’annonce de la préemption en novembre dernier. Il faut dire que la question valait son pesant d’or et c’est le cas de le dire eu égard au 800 milliards de FCFA nécessaires au financement de cette opération. Finalement conclu ce vendredi 21 juin, ce deal mené par Gabon Oil Company (GOC), l’a été grâce on l’imagine, à l’appui de plusieurs partenaires. Une bonne chose au final si on se fie à l’engouement qu’il suscite au sein de la classe dirigeante mais qui interroge toutefois sur un autre aspect: la gestion!
La gouvernance des entités publiques est un réel défi pour les gouvernants actuels, ce n’est pas un hasard si le conseil d’administration du Fonds a récemment appelé à rationaliser les transferts vers les entités publiques à travers le renforcement de la gouvernance des entreprises publiques et le rôle de l’État en tant qu’actionnaire principal, en intégrant notamment le cadre juridique et une plus grande conformité à l’Acte uniforme de l’OHADA et aux lignes directrices de l’OCDE sur la gouvernance d’entreprise des entreprises publiques. Il faut dire qu’actuellement, c’est le grand dérapage avec plus de 87 milliards de FCFA de masse salariale pour les établissements publics de l’Etat entre 2021 et 2022.
Et les difficultés ne s’arrêtent pas en si bon chemin. Des rôles et des responsabilités mal définies. Une absence d’audits diagnostics axés sur la viabilité financière de toutes les entreprises publiques. Une absence de données financières fiables comme l’ont également fait remarquer les administrateurs du Fonds au sujet de la compagnie pétrolière gouvernementale GOC, la Société minière équatoriale (SEM), la raffinerie de pétrole SOGARA, et le fonds souverain (FSRG) et son gestionnaire d’actifs (FGIS). A la lumière de tous ces éléments, la question de la gestion et non de l’acquisition de la société pétrolière Assala Energy se pose avec acuité dans un écosystème gabonais où les dirigeants ont une forte propension à faire exploser la masse salariale à vitesse grand V.
Le Gabon 2ème opérateur pétrolier sur le papier, mais dans les faits?
Si le rachat d’Assala par l’État gabonais reste une bonne chose en théorie, puisque le Gabon devient au passage le 2e producteur du pétrole de son territoire en récupérant le contrôle de près de 25% de la production totale comme l’ont affirmé le ministre de l’économie, Mays Mouissi et l’un des vice-présidents de l’assemblée nationale, Geoffroy Foumboula Libeka, il n’en demeure pas moins que ce pari demeure fortement risqué. D’ailleurs, pour la financer, dans un contexte où le pays dispose d’une note de crédit (Caa2 attribuée par Moody’s) considérée comme hautement spéculative avec une forte probabilité de défaut, l’Etat gabonais a dû, on l’imagine, fournir des garanties autres que financières.
Par ailleurs, quand on sait que la gestion d’une entreprise pétrolière publique présente plusieurs défis importants, largement exacerbés par la nature complexe et volatile de l’industrie pétrolière. Que la pression politique et les interférences gouvernementales doublés d’une gestion inefficace et d’un manque de transparence criard, rendent difficiles la gestion de toutes entreprises et encore plus des entreprises pétrolières publiques qui nécessitent un suivi et une rigueur de tous les instants. Que les défis technologiques du secteur induisent des investissements continus dans la technologie et l’innovation pour améliorer l’efficacité, réduire les coûts et minimiser l’impact environnemental, cette acquisition est à suivre avec minutie.