Gabon : les nationaux aux abonnés absents dans le commerce alimentaire

Au Gabon, la commercialisation des denrées alimentaires, pourtant cruciale pour l’économie locale, reste dominée par des acteurs étrangers. Une réalité qui s’est illustrée une fois de plus lors de la récente célébration de l’Aïd el-Fitr, marquant la fin du ramadan, période durant laquelle une majorité de commerces alimentaires ont baissé rideau, laissant les consommateurs en difficulté pour s’alimenter. Ce vide criant relance le débat sur la sous-représentation des Gabonais dans le commerce alimentaire.
Alors que l’alimentation est un besoin vital et un marché à fort potentiel, peu de Gabonais s’y intéressent en tant qu’entrepreneurs. Résultat, les points de vente et les petits commerces alimentaires sont en majorité tenus par des ressortissants ouest-africains, maghrébins ou asiatiques. Une situation qui pose un véritable problème de résilience économique. Car, comme observé lors des jours fériés, la dépendance à cette main-d’œuvre étrangère crée une vulnérabilité lorsque ceux-ci ferment leurs boutiques pour célébrer des fêtes religieuses ou nationales.
« Ce jour-là, j’ai fait tous les quartiers pour trouver un repas à emporter, tout était fermé. Même les épiceries étaient inaccessibles. On se rend compte qu’on dépend totalement des étrangers pour manger », confie Stéphane, agent de bureau à Libreville, visiblement excédé par cette situation récurrente.
Changement de mentalité et opportunité économique
Plusieurs facteurs expliquent cette absence d’implication nationale. Outre le manque d’accompagnement et de financement, le regard social porté sur le commerce alimentaire contribue à freiner l’initiative locale. Activité jugée peu valorisante, souvent associée à l’informel ou à la précarité, elle reste boudée par une jeunesse en quête de « métiers de prestige ».
Pourtant, comme le souligne un économiste local, Jean-Marc Okinda, « l’alimentation est l’un des rares secteurs qui garantit une demande constante. C’est un gisement d’emplois et de revenus stables pour peu qu’on sache l’organiser ».
Repenser la gabonisation économique
Alors que le gouvernement promeut des politiques de « gabonisation » de secteurs clés comme le transport avec Taxi Gab+, il devient urgent d’étendre cette logique au secteur alimentaire, en offrant des incitations concrètes : allègement fiscal pour les jeunes entrepreneurs, accès facilité aux financements, espaces dédiés dans les marchés urbains, ou encore programmes de formation à la gestion et à l’hygiène alimentaire.
Loin d’être un secteur marginal, le commerce alimentaire est un enjeu de souveraineté économique, mais aussi de stabilité sociale. Sa reprise en main par les Gabonais est aujourd’hui une nécessité stratégique. Car en matière de sécurité alimentaire, la dépendance n’est plus une option.
GMT TV