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Gabonisation des emplois : un modèle de recrutement à refaire

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Après presque un septennat de gèle de recrutement dans la Fonction Publique, les événements du 30 août dernier ont soulevé une vague d’espoir inédite chez les Gabonais. Le taux de chômage, actuellement d’environ 22 % (et 38% chez les jeunes), constitue une priorité des autorités de la transition. 

Les bouleversements sociaux et politiques actuels, entrainent des changements, notamment en ce qui concerne l’emploi. La gabonisation des emplois et l’embauche en général constituent un défi, y compris les mécanismes de recrutement autrefois très obscurs. La politique de la « Gabonisation des emplois » aujourd’hui oui, mais sous quels critères ? Avec quels mécanismes et pour quels buts ? 

Le défi affiché par le gouvernement de la transition est de donner la primauté des emplois aux nationaux. Qu’il s’agisse de l’administration publique ou privée, c’est donc « Gabon D’abord ». La « gabonisation des emplois » n’est pas une invention de l’administration gabonaise. Chaque pays conçoit et entérine ses mécanismes d’embauche. C’est notamment le cas de « l’ivoirisation des emplois » en Côte-d’Ivoire ou de la « sénégalisation des emplois » au Sénégal. Il s’agit donc d’un choix, voire d’une volonté de politique nationale. Ce qui démontre que le concept « Gabon d’abord » n’a pas besoin d’une longue justification. La baisse des privilèges accordés jusque-là aux étrangers vivant au Gabon, semble constituer l’explication.  L’indigence de représentation à certains poste clés depuis plusieurs années a longtemps été décriée. 

Pour le gouvernement gabonais de la transition, en matière d’emploi, les gabonais restent prioritaires, tant dans le secteur public que dans le secteur privé. « Il est tout à fait normal que l’on nourrisse d’abord ses propres enfants avant de penser à ceux du prochain. (…) Qu’on ne rejette donc pas les demandes d’emploi de nos compatriotes sous prétexte qu’ils sortent juste de l’école et qu’ils n’ont aucune expérience. » disait déjà Omar Bongo en 1978.

Or, l’évolution des conditions de recrutement en République gabonaise stagnent et semblent obsolètes. La loi n°022/2021 du 19 novembre portant code du Travail en République gabonaise nous semble aussi caduque. La seule logique du nombre d’années d’expérience tendrait à justifier l’ensemble des offres d’emploi. Cette justification parait indispensable, étant donné que l’expérience est perçue comme un gage de performance. Toutefois, peut-on se fier à une expérience d’hier qui s’est surtout soldée par un échec patent et spectaculaire ? Il n’y a qu’à voir le recul du Gabon dans plusieurs domaines. « Ce n’est pas parce que l’on a les cheveux blancs que l’on doit être considérer comme sage », dit la sagesse populaire du Gabon.  

Autrement dit, « qui sort des bancs de l’école avec tout le savoir d’un vieux routier ? La priorité de l’emploi des nationaux, c’est aussi, leur formation dans l’entreprise » concluait Omar Bongo. L’expérience comme critère de recrutement oui. Mais, l’expérience s’apprend, s’acquiert et se construit au fil du temps. Donc, le principe de l’emploi aux nationaux implique qu’à l’avenir, les termes tels “débutant s’abstenir ou bonne expérience exigée” disparaissent des offres d’emploi qui sont faites sur le marché.

Les ressources humaines ont beaucoup évolué et leur management s’adaptent sans cesse au profil du travail d’aujourd’hui. La motivation, l’expertise, les valeurs et les soft skills tendent à construire l’employé. 

Par ailleurs, les profils de docteurs ont des compétences polyvalentes et transversales. Ils ne sont pas destinés uniquement à la recherche et à l’enseignement. Les docteurs sont ainsi en capacité d’apporter à l’administration des compétences qu’elle recherche actuellement : des connaissances et savoir-faire avérés, et spécifiques à chaque domaine de recherche, ainsi que des compétences transverses ( établir un diagnostic, envisager différentes solutions et les appliquer ; gérer un projet et scinder un problème complexe en opérations simples consécutives ; chercher des financements ; collaborer à l’international ; s’exprimer de manière synthétique à l’écrit et à l’oral ; travailler en autonomie ou en équipes pluriculturelles).

Dans plusieurs pays, les jeunes docteurs rejoignent de plus en plus le secteur public hors académique. Ils sont embauchés à la fois au sein de l’État, des collectivités et des hôpitaux, les autorités indépendantes et établissements publics où ils apportent de : 

  • l’expertise au service de l’administration
  • l’expertise pour la défense et la sécurité.
  • l’expertise sur les produits de consommation
  • l’expertise en informatique et télécommunication de l’information

En définitive, l’Etat gabonais devrait faciliter l’insertion des docteurs dans les recrutements, les concours et les nominations des agents de catégorie A ou plus. Le conseil des ministres du 12 septembre dernier a ouvert le recrutement des militaires au sein de la haute administration. Cette démarche est insuffisante. Elle doit impérativement s’élargir aux docteurs et aux compatriotes de la diaspora susceptibles de participer efficacement au développement du Gabon. La formation doctorale constitue une « expérience professionnelle de recherche », qui doit conduire à la « production de connaissances nouvelles », et se termine par la rédaction et la soutenance d’une thèse.

Albin-Baptiste MABICKA MABICKA
Docteur en histoire économique, spécialiste
des investissements directs étrangers,
Ingénieur responsable pédagogique

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