Gabon : la journée continue a-t-elle contribué à améliorer la productivité dans l’administration publique ?
Adoptée le 29 décembre 2009 en conseil des ministres, entrée en vigueur « le 1er janvier 2010 » et valable « sur toute l’étendue du territoire national », la journée continue visait à doper la productivité de l’administration publique gabonaise notamment mais également à changer les habitudes. En instaurant ce principe quelques mois seulement après sa première élection controversée, Ali Bongo Ondima voulait sans doute redonner du peps à notre économie. Cependant, 14 ans, deux mandats et un coup d’Etat plus tard, qu’est ce que cette mesure a vraiment changé?
« Moi, je veux remettre l’économie et le développement au centre de nos préoccupations. Tout le monde doit comprendre que la seule voie pour nous, c’est le travail. (…) Nous allons enfin mettre en avant les notions de compétence et de productivité ». Cette déclaration à Jeune Afrique d’Ali Bongo Ondimba, alors candidat à la présidentielle gabonaise en 2009, soulignait la volonté du fils d’Omar de changer quelque peu les choses, de restaurer les mentalités des Gabonais. Pour ce faire, il entendait bouleverser les codes et les traditions, notamment dans l’administration publique, goulot d’étranglement à la fois social et financier.
Dans ce contexte, le 29 décembre 2009, il sommait son gouvernement de faire passer le travail journalier de 07H30 à 15H30 contre une répartition de 07H30 à 12H30 et de 14H30 à 18H00 auparavant. Entrée en vigueur le 1er janvier 2010, cette mesure a tout d’abord suscité l’ire des fonctionnaires gabonais, qui par la suite l’ont finalement acceptée. Il faut dire que l’administration publique a subi très peu de changements depuis les années 60. Elle ne s’est quasiment jamais renouvelée. Seuls les hommes changent, pas le système. C’est d’ailleurs celui-ci qui pose problème.
Une pause de 30 minutes prise selon un rythme approprié de roulement
En instaurant la journée de travail continue, Ali Bongo entendait donc améliorer la productivité de ses équipes. En éliminant la pause déjeuner prolongée, l’idée était de maximiser le temps de travail effectif. Sauf qu’il y a un hic, l’administration est surpeuplée, à tel point qu’il est quasiment impossible de savoir combien il y a d’agents en son sein. Si jusqu’à 2014 on estimait à moins de 50000, le nombre d’agents publics y compris la MONP, en 2024, 10 ans plus tard ce chiffre a doublé à minima, rendant inopérante toute mesure de ce type. Résultat, dans ce flou artistique, il n’est pas rare de trouver des caisses ou des bureaux vides au sein de l’administration, qui est l’une des moins efficaces du continent.
Encore active, la journée continue qui pouvait offrir une meilleure continuité dans les services fournis aux citoyens, réduire les interruptions pour permettre une gestion plus efficace des ressources humaines et matérielles, n’a pas eu l’effet escompté. Elle devait favoriser une meilleure concentration des agents de l’Etat sur leurs tâches sans interruption ou encore favoriser une gestion plus uniforme du temps, cela n’a pas été le cas. Elle devait faciliter la planification, la coordination des tâches et la réduction des heures d’ouverture et de fermeture, ainsi que la diminution des coûts liés aux pauses prolongées, ce n’est toujours pas le cas. Faut-il donc repenser ce modèle et envisager des changements profonds? Au CTRI d’en décider.
GMT TV