Gabon : entre rêve et réalité, une politique budgétaire expansionniste en trompe-l’œil
Fonds Monétaire International (FMI), Moody’s, Fitch. En parlant de la situation économique du Gabon à l’ère de la transition, toutes ces institutions font le même constat et évoquent les mêmes difficultés, entretenues par une politique budgétaire expansionniste. Alors que le contexte ne s’y prête pas, les autorités de la transition augmentent les dépenses, que ce soient celles de fonctionnement ou d’investissement. Et c’est d’ailleurs ce deuxième volet qui est le plus inquiétant selon les analystes internationaux. Peut-on assurer la viabilité de la dette publique, des finances publiques, en gros de notre économie, en maintenant une politique budgétaire expansionniste ?
Coût des emprunts plus élevés pour compenser le risque accru de défaut, réduction de l’investissement direct étranger, possibilité de dépréciation de la monnaie en lien avec une perte de confiance des marchés financiers, risques sur la stabilité et la capacité des institutions financières locales à financer l’économie. Près d’un an après le début de la transition, de nombreux risques pèsent sur notre économie, et nous exposent de plus en plus à la mise en œuvre de politiques d’austérité, lesquelles, une fois encore, n’affecteront que les moins nantis parmi les différentes couches de la population. Et c’est peu de le dire.
En abaissant la note de défaut émetteur à long terme en devises du Gabon (IDR), de « B- » à « CCC+ », l’agence de notation américaine Fitch ratings a également mis le doigt sur un problème de fond. L’usage excessif du populisme dans la gestion de la chose publique. Comme sa consœur Moody’s, qui soulignait au moment du passage à Caa2 de la note de crédit du pays en mai dernier, que « le gouvernement de transition cherche à répondre aux demandes refoulées en matière sociale et d’investissement et aux attentes populaires », Fitch a également fait part de ses inquiétudes quant à cette politique budgétaire, inopportunément expansionniste.
Le déficit budgétaire devrait se creuser un peu plus
Prévoyant que le déficit budgétaire du Gabon se creusera pour atteindre 3,9% du PIB en 2024, que la collecte des recettes devrait une nouvelle fois être en dessous des attentes malgré la poursuite des améliorations de l’administration fiscale, notamment la numérisation. En se basant par ailleurs, sur le chapelet d’annonces de dépenses visant à répondre aux importants besoins sociaux et d’infrastructures du Gabon du président de la transition qui entend également accroître le recrutement dans le secteur public, apurer les arriérés de pensions et ajouter de nouvelles exonérations fiscales, le tout sans plan d’ajustement budgétaire concret, l’agence craint donc que la situation financière du pays s’enfonce. Une analyse qui rejoint celle du FMI, qui évoque un ratio dette/PIB à plus de 102% d’ici à 2029.
Avec un déficit budgétaire qui augmentera à 5,3% du PIB en 2025 et à 5,8 % en 2026, étant donné que les recettes pétrolières devraient diminuer en raison de la baisse des prix et de la production du pétrole à partir de 2025. Des élections prévues la même année, qui pourraient rendre moins probables les mesures d’assainissement budgétaire. Le rachat d’Assala adossé au remboursement de 720 milliards de FCFA d’ici à 5 ans. La politique budgétaire actuelle semble donc n’être qu’un trompe-l’œil, destiné à faire adhérer les populations à une vision court-termiste. Ce ne sont pas les incitations à voter “Oui” à un référendum sur la nouvelle Constitution, dont on ignore jusque-là le corpus, et les velléités d’anticipation du scrutin que l’on prête au général-président, qui diront le contraire.