Gabon : incapable de réduire son train de vie dispendieux, l’Etat plus motivé à faire les poches aux étudiants

Alors que le président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguema, a annoncé la suspension des bourses pour les étudiants gabonais inscrits au Canada et aux États-Unis à partir de 2026, la décision passe mal dans l’opinion. Justifiée par la contrainte budgétaire et la nécessité de mieux répartir les ressources, cette mesure soulève un profond malaise, tant elle semble épargner les vraies niches de gaspillage. Car dans le même temps, la masse salariale de la fonction publique, déjà largement jugée inefficace, a explosé. En l’espace de deux ans, elle est passée de 691 à 825 milliards de FCFA, soit une augmentation de plus de 53 milliards rien qu’entre 2024 et 2025. Une croissance déconnectée des performances réelles des administrations publiques et qui creuse davantage les inégalités de traitement entre citoyens.
Contrairement à ce qu’exigerait un effort national équitable, ce sont les plus fragiles qui portent le fardeau de la rigueur budgétaire. Le soutien aux populations vulnérables, notamment les élèves et étudiants, a été drastiquement réduit. Entre 2024 et 2025, les aides aux boursiers du secondaire ont été amputées de 71 % (près de 5 milliards de FCFA), tandis que celles du supérieur ont chuté de 7 %, soit environ 5 milliards également. Dans le même temps, les frais d’écolage ont reculé de 9 %, et les dépenses sociales ont fondu de 59 %, passant de 13 à 8 milliards de FCFA. Des programmes cruciaux comme le Samu social, qui fournit des soins gratuits aux plus démunis, voient leur budget réduit de 18 %. Loin d’un partage équitable des sacrifices, ces coupes visent en priorité ceux qui dépendent le plus de l’aide publique.
Des ministres et hauts fonctionnaires toujours en véhicules d’apparat
Cette logique de rigueur sélective contraste avec l’opulence persistante au sommet de l’État. En effet, les dépenses de biens et services bondissent de 25 % en 2025, atteignant 378,5 milliards de FCFA, contre 284 milliards en 2024. Ces hausses ne visent pas l’amélioration des conditions de vie des citoyens, mais alimentent des dépenses de prestige et de confort d’une élite. À titre d’exemple, la ligne budgétaire allouée aux « Beaux », un poste qui inclut notamment l’achat de véhicules, est passée de 15,6 à 17,6 milliards de FCFA. Deux milliards supplémentaires dédiés à l’apparat, pendant que les aides aux étudiants à l’étranger sont supprimées.
Le contraste est d’autant plus frappant que les symboles d’injustice se multiplient. En effet, les membres du gouvernement et hauts fonctionnaires continuent d’exhiber des véhicules de plusieurs dizaines de millions de FCFA, alors qu’un seul d’entre eux pourrait couvrir les frais d’études à l’étranger d’un jeune pendant un an. Cette situation illustre une fois de plus le décalage entre les discours d’effort partagé et la réalité d’un État incapable de revoir son mode de fonctionnement pour préserver l’essentiel : l’avenir de sa jeunesse.
GMT TV