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Droits d’auteur: le paiement de la redevance en France expliqué par Tita Nzebi

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Alors que les artistes gabonais tirent le diable par la queue dans l’attente d’une décision favorable dans le procès intenté contre le Bureau gabonais des droits d’auteur (Bugada), Tita Nzebi a apporté une piste de solution. Dans un post publié sur son compte Facebook le samedi 2 octobre dernier, la compositrice a expliqué comment était reversée la redevance aux acteurs culturels par la SACEM.

Je disais, il y a quelques jours, sur ce mur, que les droits d’auteur n’étaient pas un salaire qu’un gouvernement versait à certains artistes. À moins que ce ne soit prévu par les lois de certains pays. Dans ce cas, l’expérience que je vais partager ici ne peut s’appliquer à ces pays sauf si on y change les lois. 

Avant de reverser les droits d’auteur aux ayants-droit, la Sacem, ainsi que les autres organismes qui se chargent de ces questions, procèdent d’abord à  leur collecte auprès des diffuseurs. 

Ci-dessous, vous verrez une image avec le détail des droits collectés par la Sacem ( montant, provenance…). À la fin de ce document, vous verrez une rubrique “étranger”. La Sacem collecte donc, pour ses membres, les droits issus de la diffusion de leurs œuvres à l’étranger. Mais elle ne peut le faire que là où les organismes chargés de la collecte des droits ont signé des accords avec elle. Par exemple, sur mes relevés Sacem, je perçois des droits provenant de nombreux pays sauf le Gabon. Pourtant, ma musique y est diffusée tous les jours et ce, depuis de nombreuses années. 

Image détail des droits collectés par la Sacem © D.R.

Sur le même document, vous verrez que ce sont les chaînes publiques françaises qui rapportent le plus de droits. Si au Gabon les droits des auteurs étaient payés, ma musique m’aurait déjà rapporté plusieurs centaines de millions de francs cfa… 

Image illustrative 2 © D.R.

La Sacem envoie ce détail des droits collectés à  tous ses sociétaires chaque trimestre avec des commentaires comme vous pouvez le constater sur la deuxième image. 

Étant productrice de concerts et de disques, je fais partie de ceux qui paient des droits à  la Sacem car je produis et diffuse de la musique. 

Capture du compte de BIBAKA à la Sacem © D.R.

La 3e image est une capture du compte de BIBAKA à la Sacem. Chaque fois que je produis un concert, je suis obligée de le déclarer à la Sacem  et de payer une taxe avant de faire mon concert. Le montant de la taxe est calculé en fonction du prix du billet, du coût de location de la salle, des frais de promotion et certainement de la jauge. Puisque la taxe doit être payée avant la tenue du concert, que ma salle soit pleine ou non, je paie la taxe. La Sacem s’assure ainsi que ses sociétaires, moi y compris, soient rémunérés. 

Vous remarquerez dans la lettre explicative et même dans le détail des droits collectés, des pertes liées au COVID-19. La raison est simple : pas de diffusion de musique, pas de revenus. 

La facture Sdrm © D.R.

La facture Sdrm : c’est une taxe que nous payons ici pour avoir le droit de fabriquer des disques. C’est un peu le même principe que pour les concerts. Pour pouvoir faire presser un disque ici vous devez dire à  la Sacem combien de disques vous voulez fabriquer et à quel prix de gros hors taxe vous souhaitez les vendre. Normalement, vous ne pouvez pas faire fabriquer un disque en France et dans l’Union européenne sans cette facture. Vous devez obligatoirement fournir cette facture SDRM à votre fabricant. 

Avant de pouvoir vendre vos disques vous payez d’abord les droits d’auteur. Que vous vendez vos disques ou pas, les droits d’auteur sont acquis  puisque vous les payez en amont. 

Album From Kolkata de Tita Nzebi © D.R.

Enfin mon album From Kolkata, avec la mention « CD Promo interdit à la vente ». Cette mention est obligatoire. Pour la fabrication des CD promo, on ne paie pas la même taxe que pour les CD destinés à la vente. Si un jour, je vous propose ce CD à  la vente, ne l’achetez surtout pas, ce serait du vol. 

J’espère que ces quelques éléments vous aideront à  vous faire une idée un peu moins brouillée des droits d’auteur

NB: À moins que le Gabon n’ait un système des droits d’auteur complètement différent de celui que je vous présente ici, un gouvernement ne peut pas distribuer des droits d’auteur aux artistes. Il ne peut pas décider a priori du montant des droits d’auteur à répartir. 

NB: Ceux qui perçoivent ces droits ne sont pas les plus talentueux en fonction de nos jugements personnels mais les plus diffusés. 

Une mise en place dont pourraient s’inspirer le Bugada et le ministère de la culture afin de mettre en place un système de paiement d’artistes par rapport à la diffusion de leurs œuvres. Cela permettrait à ces derniers de vivre de leur art et un tant soit peu de régler le sempiternel problème lié à la rémunération dans le secteur culturel. Pour l’heure, aucune salle de spectacle, aucun festival, aucune rémunération. Une situation qui a poussé l’Association gabonaise des artistes et la Corporation des artistes réunis, à décider d’introduire un recours auprès du Tribunal de première instance de Libreville dans cette affaire portant paiement de la redevance des droits d’auteur.

Andy Marvine Nze

Fils de Lambaréné, passionné d'écriture et féru des réseaux sociaux, qui a à cœur d'informer sur l'actualité gabonaise et internationale. Avant j'étais chef de classe, maintenant je suis titulaire d'un Master en Sciences Politiques et relations internationales

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