Mbigou : 15 ans sans radio ni télévision publique, un défi pour la Vème République

Alors que le président Brice Clotaire Oligui Nguema a prêté serment le 3 mai 2025, s’engageant devant Dieu, les Ancêtres et le peuple gabonais à « protéger [le peuple] de tout dommage », une partie du pays demeure pourtant plongée dans le silence médiatique depuis plus d’une décennie. À Mbigou, chef-lieu du département de la Boumi-Louetsi, l’absence de tout signal des médias publics illustre l’ampleur de la fracture républicaine que le nouveau régime devra résorber.
Depuis quinze ans, les quelque 10 000 habitants du département de la Boumi-Louetsi, dans la Ngounié, n’ont plus accès à Radio Gabon, Gabon Télévisions ou Gabon 24. Aucun relais, aucune fréquence, aucun journal. « Depuis la création de Gabon 1ère, nous n’avons jamais pu voir un seul journal télévisé ici », témoigne un habitant, désabusé. Même la prestation de serment du chef de l’État, événement fondateur de la Vème République, leur a été inaccessible.
Cette situation n’est pas nouvelle. Elle trouve son origine dans la privatisation de l’Office des postes et télécommunications (OPT), sans que des solutions de remplacement ne soient apportées. Ni l’ANINF ni le ministère de la Communication n’ont, jusqu’ici, restauré ces infrastructures vitales. Une absence qui pose une question centrale : comment construire une République « juste envers tous » quand des territoires entiers sont privés d’accès à l’information publique ?
Paul Marie Gondjout à l’épreuve de la Boumi-Louetsi
La nomination de Paul-Marie Gondjout au ministère de la Communication intervient à un moment charnière. Ancien ministre de la Justice et personnalité reconnue pour son combat pour la démocratie dans les heures les plus sombres du régime d’Ali Bongo Ondimba, il a désormais la responsabilité de réparer une inégalité criarde. Rétablir la présence de l’audiovisuel public à Mbigou ne serait pas seulement un acte technique, mais un geste symbolique de réintégration nationale.
Comme l’a juré le président Oligui Nguema lors de son investiture, il s’agit de « respecter et défendre fidèlement la Constitution et l’État de droit ». Or, l’article 1er de cette même Constitution garantit à chaque citoyen l’accès à l’information. En ce sens, Mbigou est un test de sincérité pour le nouveau pouvoir.
Une urgence démocratique
Dans une démocratie moderne, l’information est un droit, pas un privilège. L’exclusion médiatique dont souffre la commune de Mbigou est une violence institutionnelle silencieuse, qui marginalise les populations rurales, les coupe du débat public et affaiblit leur citoyenneté.
À l’heure où le chef de l’État veut incarner un changement de paradigme, la réparation de cette injustice devrait figurer en tête des priorités. Pour que la Vème République ne soit pas seulement une réforme institutionnelle, mais aussi une renaissance de l’égalité républicaine dans tous les territoires du Gabon.
GMT TV