Gabon : transport d’électeurs vers l’hinterland, une initiative risquée

Au Gabon, les campagnes électorales sont souvent marquées par des stratégies audacieuses pour consolider les bases électorales. Parmi elles, le déplacement massif d’électeurs des zones urbaines vers l’intérieur du pays émerge comme une pratique courante, mais hautement périlleuse. Et pour cause, des incidents et accidents sont de plus en plus légion lors de ces trajets dans les embarcations peu ou pas fiables pour la plupart.
Depuis le 17 septembre 2025, les acteurs politiques organisent le transport de populations depuis des villes comme Libreville, Kango, Akanda et Owendo vers des villages ruraux, dans l’espoir de renforcer leur influence dans ces fiefs traditionnels. En échange d’un quitus monnayé, ces citadins sont appelés à voter pour des candidats familiers, transformant ainsi le scrutin en une opération de renforcement démographique.
Attention, l’aventure tue !
Les moyens employés pour ces déplacements sont variés et souvent précaires : embarcations de fortune sur les voies fluviales, véhicules personnels mal entretenus, ou encore services d’agences de voyages improvisées. Tous les recours sont bons pour acheminer ces électeurs potentiels vers les zones rurales, où leur vote peut faire pencher la balance. Cependant, cette initiative, motivée par des intérêts partisans, expose les participants à des dangers considérables. La route nationale 1, principale artère reliant la capitale aux provinces intérieures, devient un véritable piège mortel en période de trafic intense.
Les accidents en cascade, souvent dus à la surcharge des véhicules ou à l’état dégradé des infrastructures, ont déjà causé de nombreuses pertes en vies humaines. Récemment, des incidents graves ont été signalés dans plusieurs localités, tels que Mitzic, Makokou et Kango. Des familles entières, parties exercer leur droit de vote, n’ont jamais regagné leur domicile. Pères et mères de famille, attirés par des promesses financières, ont péri dans des collisions ou des sorties de route. Ces drames soulignent l’aspect accidentogène de la nationale 1, exacerbé par le flux électoral.
Qui pour sauver qui ?
Malheureusement, les initiateurs de ces opérations, souvent des figures politiques ou leurs soutiens, échappent régulièrement à toute responsabilité. Aucune poursuite judiciaire n’est engagée contre eux pour ces pertes humaines, laissant les victimes et leurs proches dans un deuil silencieux et injuste. Cette pratique pose une question fondamentale : vaut-il la peine de risquer sa vie pour des émoluments ? Le vote, censé être un acte citoyen en faveur de projets de développement et d’idées novatrices, se voit détourné au profit de loyautés familiales ou partisanes.
Au lieu de promouvoir une participation électorale authentique, ces déplacements massifs perpétuent un système clientéliste, où l’argent prime sur la sécurité et l’intégrité. Les autorités gabonaises devraient renforcer les régulations pour interdire de telles manipulations et sensibiliser les citoyens aux risques encourus. En cette période sensible, il est impératif de prioriser la sécurité routière et l’éducation civique. Des campagnes de prévention pourraient dissuader ces voyages hasardeux, tandis que des alternatives comme le vote par procuration ou des bureaux de vote délocalisés pourraient être explorées.
GMT TV