Gabon : l’administration centrale de la Justice prend fait et cause pour Paul Marie Gondjout
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Alors que la justice gabonaise traverse une crise majeure, avec une grève des magistrats qui entre dans son deuxième mois, l’administration centrale du ministère de la Justice semble avoir trouvé une nouvelle priorité : féliciter son ministre. Vendredi 7 février 2025, dans l’enceinte du ministère, une cérémonie de vœux a été organisée en l’honneur du Garde des Sceaux, Paul-Marie Gondjout. Une mise en scène qui sonne comme un mépris assumé à l’égard des revendications des magistrats regroupés au sein du Syndicat National des Magistrats du Gabon (SYNAMAG), présidé par Landry Abaga Essono.
Des louanges ministérielles plutôt que des réponses aux magistrats. Dans son discours, le Secrétaire Général de la Chancellerie, Martin Obandja-Owoula, a dressé un bilan élogieux du ministre, mettant en avant ses prétendues réformes et la « transformation » en cours du système judiciaire gabonais. Pourtant, il a soigneusement évité d’évoquer les véritables préoccupations des magistrats, qui dénoncent une précarité institutionnelle et une ingérence politique constante dans l’exercice de leur métier.
« Nous avons un ministre engagé, dont le patriotisme et l’action traduisent sa volonté de moderniser la justice gabonaise. Nos projets avancent, les infrastructures évoluent et les textes sont finalisés. Nous sommes sur la bonne voie », a déclaré Martin Obandja-Owoula, dans une autosatisfaction déconnectée de la réalité du terrain. Une déclaration lunaire, alors même que les magistrats, en grève depuis bientôt un mois, dénoncent l’absence de moyens, des conditions de travail indignes, et un système judiciaire toujours inféodé au pouvoir exécutif.
Une administration sourde face aux revendications légitimes
Pendant que l’administration centrale entonne des louanges au ministre, les magistrats continuent leur combat. Ils réclament notamment, l’application effective du statut des magistrats et la prise des textes d’application promis depuis octobre 2023, une réelle indépendance judiciaire, face aux tentatives d’instrumentalisation du pouvoir judiciaire et des infrastructures dignes, alors que certaines juridictions sont dans un état de délabrement avancé et que les magistrats sont parfois contraints d’emprunter des toilettes à l’extérieur des tribunaux.
Face à cette situation, Landry Abaga Essono, président du SYNAMAG, fustigeait le même jour, au palais de Justice de Libreville, devant la presse nationale et internationale, le silence méprisant du ministère. Il rappelle que le combat des magistrats dépasse leurs intérêts personnels. « Nous refusons d’être les complices d’une justice instrumentalisée. Nous demandons au peuple gabonais de comprendre que cette lutte, bien que contraignante pour eux aujourd’hui, est essentielle pour garantir leurs droits et libertés demain », a-t-il martelé.
Un bilan loin de convaincre
Si l’administration centrale se félicite des quelques infrastructures rénovées et des symposiums organisés, la réalité est bien différente. Les magistrats, eux, dénoncent une justice paralysée, incapable de répondre aux attentes des justiciables, et qui demeure sous le joug du pouvoir exécutif. « Le ministre a beau parler de réforme, si les magistrats ne peuvent pas exercer leur métier dans des conditions décentes et avec indépendance, toute cette mise en scène n’a aucun sens ! », s’indigne un magistrat gréviste.
Loin de chercher à apaiser la crise, l’administration centrale semble privilégier la politique du déni et du mépris. Offrir un cadeau au ministre pendant que les magistrats réclament un minimum de dignité professionnelle, c’est envoyer un message clair : les revendications des juges, ces hommes et femmes qui rendent la justice au nom du peuple gabonais, ne sont pas une priorité.
Une situation qui, si elle persiste, risque d’envenimer encore plus le climat social et de creuser le fossé entre le pouvoir et les professionnels du droit. La balle est désormais dans le camp du gouvernement, qui devra choisir entre une vraie réforme de la justice ou la perpétuation d’un système au service des intérêts politiques.
GMT TV