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Gabon : fichier électoral et décès non déclarés, l’État face à ses propres contradictions

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Alors que la Vème République se veut l’ère du renouveau démocratique, la révision du fichier électoral en vue des élections locales et législatives de septembre 2025 révèle une anomalie aussi ancienne que persistante : la présence, par milliers, de personnes décédées sur les listes électorales. Une situation qui interroge directement l’efficacité de l’administration centrale, la coordination entre ses services… et la responsabilité politique du ministre de l’Intérieur, Hermann Immongault.

Lancé le 14 juillet dernier, l’exercice de révision de la liste électorale par le ministère de l’Intérieur vise, entre autres, à radier les électeurs décédés. Une opération pourtant rendue difficile par l’incapacité chronique de l’administration à croiser les fichiers de l’état civil et du corps électoral. Un paradoxe incompréhensible, quand on sait que les deux registres sont gérés par des structures relevant du même ministère : les mairies pour les actes de décès, la Direction générale des élections (DGE) pour le fichier électoral.

Une incohérence administrative qui mine la crédibilité du processus électoral

Comment comprendre qu’en 2025, à l’ère de la gouvernance numérique et de la transparence proclamée par les autorités de la Transition, le Gabon soit toujours incapable de « vider » son fichier électoral des défunts, parfois décédés depuis plusieurs décennies ? Cette carence de coordination entre services publics soulève une question plus profonde : à qui profite réellement cette anomalie ?

Les observateurs les plus avertis y verront une brèche entretenue dans le système, permettant potentiellement des fraudes par procuration, des doublons organisés, ou encore des manipulations arithmétiques des résultats. « Tant que ces dysfonctionnements ne seront pas réglés, les élections ne pourront pas être perçues comme pleinement crédibles », estime un analyste politique interrogé par Gabon Media Time.

Une responsabilité politique qui ne peut plus être éludée

Le ministre de l’Intérieur, Hermann Immongault, peut-il encore ignorer la gravité de cette situation ? En vertu de l’article 50 de la loi organique n°001/2025 du 19 janvier 2025, les services de son ministère sont légalement tenus de procéder à la radiation des électeurs décédés sur la base des actes transmis par les mairies. Or, ces radiations restent partielles, sporadiques, et dépendent parfois de la seule volonté des familles. La faute à un système défaillant, mais surtout à une absence de rigueur politique.

Dans un pays où les élections sont perçues comme les piliers de la légitimité, maintenir dans les fichiers électoraux des individus décédés constitue une faute grave contre la démocratie. En toute logique républicaine, un tel manquement devrait entraîner une prise de responsabilité politique claire.

Une exigence de transparence à l’ère de la Vème République

L’enjeu est donc clair : à l’heure où le Gabon se prépare à écrire une nouvelle page de son histoire institutionnelle, toute tentative de reconstruction démocratique passera par la fiabilité du fichier électoral. Une exigence à laquelle le ministre de l’Intérieur, garant de la transparence du processus, ne peut se soustraire. À défaut, c’est la crédibilité même des élections législatives et locales de 2025 qui sera entachée.

La Vème République appelle à un sursaut. Il est temps que l’administration électorale et l’état civil fonctionnent en symbiose. Il est temps que les responsables politiques assument leurs défaillances. Il est surtout temps que le Gabon cesse d’organiser des élections avec des morts.

Casimir Mapiya

« Mieux vaut une vérité qui fait mal, qu'un mensonge qui réjouit. » Proverbes berbères

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