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Corruption : le Mali vient s’inspirer du Gabon, temple des opérations «Scorpion» et «Mamba»… sans venin

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Il fallait oser. Le 15 mai 2025, une délégation malienne conduite par le président de l’Office central de lutte contre l’enrichissement illicite, Moumouni Guindo, est venue s’imprégner de l’« expérience gabonaise » en matière de transparence et de gouvernance éthique rapport Gabonreview. Objectif affiché : importer les bonnes pratiques. À Libreville, la scène aurait prêté à rire si elle n’illustrait pas, une fois de plus, l’ampleur du théâtre institutionnel sur fond de lutte anticorruption molle et sans suite.

Le ministre de la Justice, Séraphin Akure-Davain, visiblement très inspiré, a salué cette coopération Sud-Sud qu’il juge « ancrée dans les réalités locales ». Réalités, en effet : depuis les opérations « Mamba » et « Scorpion », lancées à grand renfort de tambours sous le régime Bongo pour moraliser la vie publique, aucun grand nom n’a vu autre chose que le couloir d’un parquet. Une mise en scène où les « suspects » restent très souvent les meilleurs amis du pouvoir… ou ses futurs alliés.

Un dispositif de lutte contre la corruption inopérant

La Commission nationale de lutte contre la corruption, présidée par Nestor Mbou, semble quant à elle, condamnée à l’hibernation stratégique. Les rapports ne sont jamais rendus publics, les enquêtes rarement menées à leur terme, et le patrimoine de certains hauts fonctionnaires reste aussi opaque que leur gestion des fonds publics.

Ironie du sort, alors même que les autorités gabonaises sont incapables de justifier la sortie nocturne de la famille Bongo vers l’Angola – pourtant poursuivie pour détournement massif de fonds publics – elles se présentent désormais comme source d’inspiration continentale en matière de transparence.

Les Maliens, sans doute pleins de bonne volonté, ont peut-être confondu « lutte contre la corruption » avec « art de la résilience bureaucratique ». Ou peut-être cherchent-ils à étudier un cas d’école : comment mettre en place des institutions de contrôle… sans jamais contrôler.

L’ultime perle revient au ministre Akure-Davain, louant le « courage des dirigeants africains » à engager des réformes risquées. Sauf que, dans le cas gabonais, la seule réforme tangible reste celle du vocabulaire. Les « opérations » sonnent bien, les « commissions » posent joliment dans les salons climatisés, et les discours donnent bonne conscience. Mais la corruption, elle, continue de circuler sans contravention, sur les boulevards dorés du pouvoir.

Alors, Messieurs de Bamako, prenez bonne note : au Gabon, l’enrichissement illicite n’est pas une faute… c’est une filière.

Henriette Lembet

Journaliste Le temps est une donnée fatale à laquelle rien ne résiste...

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