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Affaire Opiangah : vers une condamnation du Gabon par la Commission africaine des droits de l’Homme ?

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Alors que le Gabon s’efforce de redorer son image sur la scène continentale en se revendiquant d’une nouvelle ère démocratique post-30 août 2023, une affaire à la fois sensible et emblématique menace de mettre en lumière les limites du processus de restauration de l’État de droit. Celle de l’ex-ministre des Mines Hervé Patrick Opiangah, poursuivi dans une affaire d’inceste largement contestée, aujourd’hui en exil, et dont la défense a porté l’affaire devant la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP).

Une plainte internationale aux lourdes conséquences politiques. Pour ses avocats français, Me Marc et Me Julien Bensimhon, la procédure en cours est sans appel : « La justice gabonaise est au défi de sa propre crédibilité », affirment-ils. Selon eux, la procédure initiée contre leur client est le fruit d’une machination politique, consécutive à la prise de position publique d’Hervé Patrick Opiangah contre le référendum constitutionnel de novembre 2024. 

Depuis cette prise de position, le président de l’Union pour la démocratie et l’intégration sociale (UDIS) aurait été la cible d’un véritable acharnement politico-judiciaire, doublé d’une répression économique contre ses entreprises, mettant au chômage plus de 6 500 Gabonais.

« Il n’existe aucune plainte de la prétendue victime, aucun élément matériel, aucun fait probant. Pire : la principale concernée a formellement nié l’existence d’un quelconque abus, à trois reprises, y compris devant le procureur », martèle Me Julien Bensimhon. Malgré cela, l’instruction se poursuit, les comptes de ses entreprises restent gelés, et la procédure judiciaire, selon la défense, reste manipulée par une logique de vengeance politique.

Un test pour la justice gabonaise, un risque pour l’État

En saisissant la Commission africaine, les conseils de l’Homme politique veulent alerter les instances régionales, mais aussi mettre la pression sur les juges gabonais. Car, comme l’affirme Me Marc Bensimhon, « ce dossier est un test pour l’indépendance de la justice gabonaise ». Si les magistrats refusent de constater l’absence de fondement de la procédure, la Commission africaine pourrait, dans les mois à venir, condamner le Gabon pour violations flagrantes des droits de l’homme : atteinte à la liberté, violation du droit à un procès équitable, confiscation de biens, et instrumentalisation de la justice à des fins politiques.

« Ce n’est pas une démarche radicale, mais une ultime tentative pour obtenir justice quand toutes les voies internes ont été épuisées », insiste Me Bensimhon. L’enjeu est double : faire reconnaître l’innocence d’un homme accusé sans preuve, mais aussi garantir que des milliers de travailleurs gabonais retrouvent leur emploi, et que le droit, désormais brandi comme étendard de la transition, soit enfin respecté.

À l’heure où le Gabon cherche à crédibiliser son tournant institutionnel, une éventuelle condamnation par la Commission africaine entacherait lourdement cette trajectoire. Elle rappellerait surtout que la vraie rupture ne se décrète pas : elle se prouve.

Henriette Lembet

Journaliste Le temps est une donnée fatale à laquelle rien ne résiste...

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