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Réformes de la Ve République : un chantier titanesque pour une gouvernance en quête d’efficacité

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Au lendemain d’un scrutin présidentiel inédit par sa rapidité et son calme, le président élu Brice Clotaire Oligui Nguema semble vouloir transformer l’essai par un vaste chantier administratif. Plus de 1 000 textes à produire, une réorganisation institutionnelle profonde, et surtout, une volonté affichée d’ancrer le pays dans la réalité de la Ve République. Derrière l’élan réformateur, des interrogations demeurent.

Une volonté de rupture avec l’héritage institutionnel. « Il faut que ça aille vite ! » aurait lancé le président de la Transition à ses collaborateurs ce lundi 14 avril. Le ton est donné. Brice Oligui Nguema ne veut pas d’une présidence d’attente, encore moins d’une administration figée. L’enjeu : traduire en actes les promesses de la nouvelle Constitution, et surtout, matérialiser la suppression du poste de Premier ministre, symbole d’une architecture institutionnelle désormais jugée obsolète.

Au cœur de cette nouvelle organisation, une équation à résoudre : qui pour coordonner l’action gouvernementale ? Si la création d’un vice-président du gouvernement est évoquée, le flou persiste sur ses prérogatives exactes. Une chose est certaine, l’administration centrale devra être redéployée, recentrée, mais aussi rendue plus efficace dans ses mécanismes d’exécution.

Une administration décentralisée, mais avec quels moyens ?

L’autre pilier de cette Ve République, c’est bien sûr la décentralisation. Vantée depuis les années 1990, promise dans les textes, rarement concrétisée. Oligui Nguema veut accélérer. Mais il prévient : « Qui dit décentralisation dit aussi taxe foncière ». L’autonomie financière des collectivités locales passe donc par un nouvel impôt, source potentielle de tensions si son application est mal préparée.

Par ailleurs, l’évocation de la fiscalité locale renvoie à une question plus large : comment construire des administrations locales capables de gérer, lever et redistribuer les ressources ? Faute de cadres qualifiés et de mécanismes de contrôle, la décentralisation pourrait vite devenir un transfert d’inefficacité au niveau communal.

Une réforme qui exigera méthode, courage et transparence

En annonçant qu’il connaît déjà « la date du découpage administratif » ou encore celle des futures élections législatives et locales, le président élu démontre une volonté de maîtriser son agenda politique. Mais le défi est ailleurs : traduire ces intentions en textes de lois cohérents, applicables et portés par une administration réformée, débarrassée des lourdeurs bureaucratiques et des réflexes de l’ancien régime.

Pour réussir ce pari, le pragmatisme devra s’accompagner d’une concertation élargie, notamment avec les élus locaux, les juridictions administratives, mais aussi la société civile, qui reste la meilleure garante de l’ancrage territorial de ces réformes.

Une 5e République à construire, mais pour qui ?

Enfin, une question fondamentale demeure : cette Ve République sera-t-elle l’œuvre d’un seul homme ou celle d’un collectif au service du peuple ? Le rythme effréné annoncé, la centralisation des décisions, la verticalité assumée du pouvoir inquiètent certains observateurs.

Au-delà des textes, c’est donc la philosophie de gouvernance qui sera scrutée dans les prochains mois. Car si la transition a permis d’ouvrir une nouvelle page, c’est à travers les réformes et leur mise en œuvre que le régime Oligui Nguema gagnera ou perdra sa légitimité. Le chantier est vaste, les attentes immenses. L’histoire, elle, n’accordera aucun délai supplémentaire.

Henriette Lembet

Journaliste Le temps est une donnée fatale à laquelle rien ne résiste...

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