Refonder l’administration publique : urgence républicaine, exigence nationale

Avec la Ve République, le Gabon ouvre un cycle de reconstruction républicaine. Cette refondation passe par une réforme en profondeur de l’administration publique, centrée sur le capital humain, la conscience du service (au) public et la performance. Inspirée par les recommandations des Assises nationales sur l’emploi, cette tribune analyse les conditions d’une fonction publique repensée à la lumière des expériences nord-européennes et nord- américaine.
Un moment de bascule historique
Le 3 mai 2025, le président Brice Clotaire Oligui Nguema a prêté serment, marquant le départ de la Ve République. Ce n’est pas seulement une transition politique, mais un appel à une refondation institutionnelle. Une République forte repose sur une administration crédible, compétente et capable d’incarner les attentes du peuple.
Une administration en quête de légitimité et d’efficacité
Le constat est connu : notre administration souffre d’un manque d’efficience, de lenteurs et parfois d’un déficit de légitimité. Elle doit se transformer pour redevenir le bras opérationnel de l’État au service de l’intérêt général. Mais cette transformation ne peut être purement technocratique. Elle doit être humaine, structurante et durable.
Le capital humain, clef de voûte de la réforme
Les Assises nationales sur l’emploi ont insisté sur la nécessité de reprofilage des stratégies nationales de formation et de qualification professionnelle. Le défi est double : adapter l’offre de formation aux besoins actuels de la fonction publique, et insuffler une culture de la responsabilité, du service et de la performance. La fonction publique, qui demeure le premier employeur du pays, doit devenir un véritable levier de modernisation sociale.
L’exemple nordique et américain : une boussole
Les pays nord-européens – comme la Norvège, la Finlande ou la Suède – ont su faire du service public un socle de la citoyenneté. Dans ces pays, le respect, la compétence et la rigueur des agents publics font partie intégrante de la culture nationale. Aux États-Unis, la fonction publique repose sur un système de mérite très structuré, qui valorise les résultats et les compétences plus que l’ancienneté. Dans les deux modèles, la professionnalisation du secteur public repose sur une formation continue exigeante, une culture de l’évaluation et un fort sens de l’éthique professionnelle.
Un service public gabonais repensé pour le développement
Il est temps que le Gabon s’inspire de ces pratiques pour concevoir une administration connectée aux besoins des citoyens, avec des fonctionnaires capables d’innover, de décider et de rendre des comptes. Il faut donc réinvestir dans la formation initiale, la formation continue, les écoles professionnelles et les instituts de service public. Il est également nécessaire de créer des passerelles entre universités, centres de recherche et administration, pour mieux adapter les formations aux réalités du terrain.
La proximité : décentralisation et redevabilité
La mise en œuvre effective de la loi 15/96 sur la décentralisation permettrait d’ancrer l’administration dans les territoires. Cette proximité est essentielle pour que les décisions publiques soient compréhensibles, applicables et évaluées à l’échelle locale.
Conclusion : une ambition collective
Refonder la fonction publique gabonaise n’est pas un luxe, c’est une urgence. Elle est la condition de réussite de toute politique publique. Elle est le miroir de l’État, la vitrine de la République. Cela suppose un sursaut éthique, un engagement politique fort, mais aussi une mobilisation nationale autour d’un objectif commun : bâtir une administration publique qui serve le citoyen, porte le développement et incarne les valeurs de la République.
Bertille Patricia Ozounguet Ontchangalt
Manager des Administrations publiques
GMT TV