Pêche artisanale : le Gabon veut reconquérir un secteur dominé à 95 % par des étrangers

À l’issue d’une journée de réflexion tenue le 14 juillet 2025 à Libreville, les acteurs de la pêche artisanale ont appelé à une nationalisation progressive de la filière, encore largement contrôlée par des opérateurs non gabonais. Le ministère de la Mer veut enclencher une refondation pour faire de ce secteur stratégique un pilier de la souveraineté économique et alimentaire.
La scène s’est déroulée à Libreville, dans le cadre d’un atelier organisé par le ministère de la Mer autour du thème : structurer, financer, nationaliser. En toile de fond, un constat préoccupant : plus de 95 % des pêcheurs artisanaux opérant dans les eaux gabonaises sont originaires du Nigeria, du Ghana ou du Bénin. Une prédominance étrangère devenue la norme, reléguant les nationaux à un rôle marginal dans une activité pourtant vitale pour l’économie locale.
Un secteur stratégique abandonné par les nationaux
Face à cette réalité, Yents Kumbe, président de la Coopérative équatoriale des pêcheurs du Gabon, a sonné l’alerte : « Aujourd’hui, nous sommes dans une phase de relance de notre économie. Il est essentiel de revaloriser tous les secteurs capables de contribuer au PIB national, et la pêche artisanale en fait partie. » Pour lui, cette journée de réflexion n’est pas une simple consultation, mais le point de départ d’un redressement attendu depuis des décennies.
Les participants ont mis en lumière le double paradoxe de cette filière : elle génère des richesses importantes mais échappe en grande partie aux Gabonais, à cause d’un manque de formation, de mécanismes de financement et de soutien étatique.
Nationalisation progressive et cadre juridique renforcé
Au terme des échanges, les professionnels ont proposé une feuille de route ambitieuse. Elle repose sur trois piliers : la création d’un cadre juridique clair et protecteur pour les pêcheurs nationaux ; la mise en place de financements accessibles pour l’achat d’équipements ; et le renforcement des compétences locales, à travers des programmes de formation et de structuration des coopératives.
Cette volonté de nationalisation progressive, exprimée sans équivoque par les acteurs du secteur, répond aussi à un impératif stratégique : réduire la dépendance alimentaire et faire de la mer une source pérenne de croissance inclusive. En d’autres termes, reconquérir la mer pour redonner un avenir aux communautés côtières.
Alors que le Gabon cherche à bâtir une économie plus résiliente et plus équitable, la pêche artisanale pourrait bien devenir l’un des symboles de sa souveraineté retrouvée – si tant est que les engagements du 14 juillet se traduisent en actes concrets.
GMT TV