Mouity Nzamba : « Oligui Nguema doit être le président de tous les Gabonais, pas des troupes familiales ou claniques »
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Le Gabon traverse une période cruciale de son histoire politique. Après le coup d’État du 30 août 2023, le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), dirigé par le général Brice Clotaire Oligui Nguema, s’était engagé à restaurer un État impartial et à rompre avec les pratiques du passé. Pourtant, de plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer des dérives inquiétantes, notamment une gouvernance teintée de favoritisme ethnique et clanique. Benoît Joseph Mouity Nzamba, président du Parti gabonais du progrès (PGP) et figure historique du combat pour la démocratie, ne mâche pas ses mots sur cette question.
Invité sur Le Canapé Rouge de Gabon Media Time, Benoît Joseph Mouity Nzamba a pointé du doigt la montée d’un sectarisme institutionnalisé sous le CTRI. « Le président Oligui Nguema, ce n’est pas le président des seuls Tékés ou des seuls Fangs. Il est le chef de l’État gabonais, un État pluri-ethnique », rappelle-t-il d’emblée. Or, selon lui, la gestion actuelle s’appuie sur des structures communautaires qui favorisent des groupes précis, au détriment d’un projet national inclusif.
L’homme politique cite en exemple la montée en puissance de l’organisation Ossimane, une structure née récemment et qui, selon lui, bénéficierait d’un soutien financier considérable de proches du président de la République. « Il y a une structure qui est, paraît-il, parrainée par un parent direct du président et qui sème partout avec des moyens colossaux pour créer des associations à tout va. Ossiman, vous trouvez que ça aide Oligui Nguema ? » s’interroge-t-il.
Autre point de discorde, l’association Tsoumou, affiliée aux Tékés, et qui serait influencée par le général Idriss Ngari. « Oui, mon beau-frère, le général. C’est un grand personnage. Mais avons-nous besoin de cela ? Où allons-nous avec ça ? » s’insurge le président du PGP.
Une menace pour la cohésion nationale ?
Ce favoritisme ethnique et clanique pose une véritable menace pour la stabilité du pays. Après 60 ans d’indépendance, le Gabon peine encore à se défaire des logiques d’exclusion et de clientélisme, qui ont longtemps caractérisé le régime Bongo-PDG. Si la transition veut réellement tourner la page, elle doit éviter de reproduire ces schémas archaïques.
Loin d’être une simple dénonciation, le cri d’alarme de Mouity Nzamba est un appel à recentrer l’action politique sur l’intérêt général. Il interpelle directement le chef de l’État : « Il n’a pas besoin de troupes familiales ou claniques, il a besoin des Gabonais qui adhèrent à son projet ».
Le PGP, parti historique fondé aux côtés de Maître Louis Agondjo Okawé, refuse de cautionner cette trajectoire. Il exhorte le Comité pour la transition et la restauration des institutions à garantir une transition équitable et républicaine, au service de tous les Gabonais.
Alors que le pays se dirige vers une élection présidentielle incertaine en avril 2025, une question se pose : Oligui Nguema rompra-t-il avec cette dynamique dangereuse ou entérinera-t-il une nouvelle ère de division ? Le peuple, quant à lui, observe et jugera.
GMT TV