Lutte de pouvoir au PDG : le juge des référés saisit la Cour constitutionnelle

Dans l’affaire qui oppose le Parti démocratique gabonais (PDG) à son ancien cadre Ali Akbar Onanga Y’Obegue, le tribunal de première instance de Libreville, siégeant en référé, a décidé de surseoir à statuer en raison d’une exception d’inconstitutionnalité soulevée par la défense. Une décision à fort enjeu politique, à l’approche des élections législatives.
C’est un nouvel épisode d’un feuilleton politico-judiciaire à fort retentissement. Opposé à Ali Akbar Onanga Y’Obegue, qu’il accuse d’usurpation de qualité et de menace grave à sa légitimité institutionnelle, le Parti démocratique gabonais (PDG) a été contraint de patienter encore. Le juge des référés de Libreville, saisi en urgence par le parti via Maître Cédric Maguisset, a estimé que l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par la défense était recevable et a saisi la Cour constitutionnelle, suspendant ainsi toute décision au fond.
Une bataille pour la légitimité… suspendue
Au cœur du contentieux, le conflit de légitimité entre la direction actuelle du PDG – incarnée par Angélique Ngoma, Secrétaire générale intérimaire – et Ali Akbar Onanga Y’Obegue, désigné secrétaire général du parti le 14 mai 2025 par Ali Bongo Ondimba, en rupture totale avec le directoire provisoire mis en place en mars 2024. Face à ce qu’il qualifie d’usurpation de titre, le PDG demandait en référé l’interdiction pour M. Onanga d’utiliser le nom, les attributs et les signes distinctifs du parti, ainsi que le retrait immédiat de toutes ses communications.
Mais Me Francis Nkea, avocat d’Ali Akbar Onanga, a contre-attaqué sur le terrain de la constitutionnalité des actes du PDG, notamment sur les modalités de désignation de ses organes dirigeants dans un contexte de transition politique. Une stratégie qui a conduit le juge à suspendre l’examen de l’affaire, en attendant l’arbitrage de la Cour constitutionnelle.
Un risque politique pour le PDG à l’approche des élections
Cette suspension judiciaire, à moins de deux mois des élections législatives et locales prévues le 27 septembre 2025, fragilise considérablement le PDG, qui redoute que le Ministère de l’Intérieur interprète ce conflit interne comme un bicéphalisme politique, justifiant une suspension administrative du parti sur la base de l’article 64 de la nouvelle loi sur les partis politiques. Une telle décision aurait pour conséquence immédiate l’exclusion du PDG des élections à venir, et donc son absence dans la future architecture institutionnelle, y compris au Sénat.
« C’est la survie même du parti qui est en jeu, et au-delà, l’expression politique de centaines de milliers de Gabonais », confiait à Gabon Media Time un cadre du directoire provisoire, sous couvert d’anonymat.
L’urgence d’un arbitrage constitutionnel
Reste désormais à savoir si la Cour constitutionnelle, récemment recomposée, tranchera rapidement cette affaire, dans un contexte où les candidatures seront déposées entre le 27 juillet et le 7 août. En cas de retard ou de flou, la bataille judiciaire pourrait se transformer en arme politique de neutralisation, dans un paysage fragmenté où les enjeux de représentativité sont cruciaux.
À Libreville comme à l’intérieur du pays, l’opinion s’interroge : un parti peut-il être suspendu sans décision judiciaire sur le fond, sur simple interprétation administrative d’un conflit interne ? Et surtout, quelle est la légitimité d’un leader désigné par une autorité politique (Ali Bongo) qui, dans une lettre du 20 septembre 2024, a annoncé son retrait de la vie publique ?
Autant de questions que la justice constitutionnelle devra trancher. Mais d’ici là, le Parti démocratique gabonais reste sur le fil.
GMT TV