Jean Valentin Leyama : « UDB, le parti présidentiel : une légalisation à la vitesse hypersonique hors la loi ? »

En moins de deux mois, l’Union Démocratique des Bâtisseurs (UDB), présentée comme le parti présidentiel, est passée du simple projet à une légalisation expresse, défiant les délais légaux et soulevant de vives interrogations. Entre contorsions juridiques, célérité inhabituelle des institutions et adhésions validées à la vitesse de l’éclair, Jean Valentin Leyama interroge la légitimité d’un processus dans une tribune intitulée « Union Démocratique des Bâtisseurs (UDB), le parti présidentiel : une légalisation à la vitesse hypersonique hors la loi ? », qui, selon lui, s’apparente davantage à une course politique hors la loi qu’à un respect rigoureux de l’État de droit. Lecture.
1. Retour sur la création controversée du parti présidentiel.
Au lendemain de l’élection présidentielle du 12 avril 2025 remportée par le Président de la Transition, le Général Brice Clotaire Oligui Nguema, le projet de la création d’un parti politique à sa dévotion prend progressivement corps et s’impose dans l’opinion.
Le processus aurait pu prendre le cours d’un long fleuve tranquille si, dans un post du 10 juin 2025 (https://www.facebook.com/share/p/19n2Wg4UzY/), Votre humble serviteur, toujours lui, a-t-on dit, n’avait soulevé un point essentiel de droit : l’impossibilité cette opération, en vertu des dispositions de l’article 82, alinéa 3, du Code électoral, M. Oligui s’étant présenté à cette élection en qualité d’indépendant.
S’en est alors suivi pendant trois semaines, une immense controverse entre les opposants au projet, peu nombreux, et des bataillons de partisans, plutôt des thuriféraires du Général-Président. Deux parmi ces derniers, sans une lecture appropriée de la loi, notamment les dispositions de l’article 116 de la Constitution, volent au secours de leur champion et saisissent la Cour Constitutionnelle, le 13 juin, pour interprétation de l’article 82 incriminé.
Leur requête est motivée par leur souci de faire barrage aux « pourfendeurs » (suivez mon regard), du projet de création par le Président de la République « d’une formation politique qui devrait légitimement accompagner la mise en œuvre de son projet de gouvernement pour le pays (…).
Malheureusement pour nos anciens compagnons de l’Opposition pré-30 août 2023, en vertu des dispositions de l’article 116 de la Constitution lequel fixe limitativement la qualité des personnes compétentes pour saisir la Cour en interprétation, à savoir, le Président de la République, les Présidents des deux chambres du Parlement, ou le 1/10e des parlementaires dans chaque chambre, leur requête a été déclarée irrecevable par décision n°031/CCT du 30 juin 2025.
Dans ce feuilleton devenu affaire d’État, on s’est alors étonné de l’intervention du Président de l’Assemblée nationale sur un sujet plus politique que parlementaire. Lui aussi, allègue de « vives réactions dans l’opinion publique dont une partie estime qu’une telle démarche serait contraire aux dispositions de l’article 82 alinéa 3 de la loi organique n°001/2025 du 19 janvier 2025 portant Code Electoral en République Gabonaise « . La République se met en branle pour répondre aux réactions de l’opinion.
Le PANT, ayant qualité à agir, sa requête a été déclarée recevable et dans un exercice de contorsion juridique, éloignée de l’esprit de l’article 82 de la loi précitée, elle a autorisé le Président de la République à créer son parti politique par décision n°032/CCT du 30 juin 2025, soit 4 jours seulement après la saisine, appréciez la célérité inhabituelle de l’Institution !
2. Une légalisation expresse
La procédure de légalisation des partis politiques est définie par la Loi n°016/2025 du 27 juin 2025 relative aux partis politiques en République Gabonaise, laquelle dispose :
« Article 26 : Le dépôt du dossier de légalisation d’un parti politique donne lieu à la délivrance d’un accusé de réception.
Article 27 : Dans un délai maximum de soixante (60) jours ouvrés à compter de la date de dépôt du dossier, le Ministre de l’Intérieur fait procéder à toute vérification à l’effet de s’assurer de la conformité à la loi du dossier de légalisation du parti.
Article 28 : Dans le cas où le dossier de légalisation du parti est jugé conforme à la loi, le Ministre de l’Intérieur délivre un récépissé provisoire au parti politique.
Article 29 : Si à l’expiration du délai de soixante (60) jours ouvrés après le dépôt du dossier de déclaration, aucune notification de conformité ou de non-conformité à la loi n’est parvenue au parti politique concerné, le dossier de légalisation est réputé conforme à la loi. L’accusé de réception emporte récépissé provisoire.
Article 30 : Le récépissé définitif est délivré par le Ministre de l’Intérieur, après vérification des éléments du dossier visés à l’article 25 ci-dessus, dans un délai d’un an maximum à compter de la date de délivrance de l’accusé de réception. Le récépissé définitif doit être publié au Journal Officiel ou dans un journal d’annonces légales. »
Pour résumer, il faut au maximum 60 jours pour obtenir un récépissé provisoire et un an pour le récépissé définitif. Il s’agit de maxima bien entendu mais tout de même !
Créé officiellement le 5 juillet 2025, 30 jours plus tard, le 4 août, l’UDB investit ses candidats aux élections du 27 septembre 2025. En moins de 30 jours, les services compétents ont achevé de vérifier un état d’adhésions de plus de 10.000 militants avec NIP, s’il vous plaît et se sont assurés que tous ont démissionné de leurs anciennes formations politiques. Waouh !
Légalisation hypersonique. Historique, non ?
Jean Valentin Leyama
Député de la transition
GMT TV