Gabon : pourquoi 87 % des jeunes disent que «le pays va dans la bonne direction» ?
Selon le dernier rapport Afrobarometer, 87 % des jeunes de 18 à 35 ans estiment que le Gabon évolue dans la bonne direction. Un indicateur inédit qui traduit un spectaculaire regain d’optimisme depuis le coup d’État du 30 août 2023, mais qui pose aussi la question de la capacité de la Transition à transformer cette confiance en réalité durable.
Le dernier rapport Afrobarometer, publié le 13 novembre 2025, révèle un chiffre sans précédent : près de neuf jeunes Gabonais sur dix (87 %) considèrent que le pays avance dans la bonne direction. Un bond colossal comparé au niveau de défiance observé entre 2015 et 2023, période marquée par les crises politiques et la dégradation économique du pays.
Selon les enquêteurs, cette embellie est directement liée au « changement de climat politique », conséquence du renversement d’Ali Bongo et de l’arrivée du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI). La présidentielle d’août 2024, avec un taux de participation record de 70,11 %, a également renforcé l’idée d’un « nouveau départ ».
Un capital d’espoir « post-30 août » encore fragile
Pour les jeunes interrogés, la rupture du 30 août 2023 reste un repère décisif. Beaucoup y voient la fin d’une époque marquée par la corruption systémique, les détournements massifs révélés lors du procès de la « Young Team », et l’absence d’opportunités économiques. L’arrivée de Brice Clotaire Oligui Nguema au pouvoir a suscité l’espoir d’un assainissement institutionnel et d’un rééquilibrage économique.
Cependant, si la confiance est élevée, elle demeure conditionnée à des attentes très fortes : 63 % des jeunes identifient la création d’emplois comme la priorité absolue, tandis que 50 % d’entre eux se déclarent au chômage. Un chiffre qui montre que l’optimisme n’efface pas la réalité sociale.
Une jeunesse éduquée, mais sans perspectives claires
L’étude souligne un paradoxe frappant. Avec un taux d’instruction parmi les plus élevés d’Afrique centrale, les jeunes Gabonais devraient être un moteur de croissance. Pourtant, les trois quarts des jeunes diplômés déclarent que l’enseignement ne leur fournit pas les compétences nécessaires pour entrer sur le marché du travail.
L’inadéquation entre formation et emploi, déjà mise en lumière par plusieurs rapports publics, reste l’un des freins majeurs à l’intégration professionnelle. Cet écart alimente les frustrations mais stimule également une dynamique nouvelle : 51 % des jeunes souhaitent créer leur entreprise, signe d’une volonté de reprendre leur destin en main.
Des améliorations visibles, mais un risque de déception rapide
Dans le domaine des infrastructures, l’étude observe une nette amélioration : 63 % des jeunes saluent l’état des routes et 57 % la qualité des services de santé. Des indicateurs supérieurs à la moyenne africaine. Toutefois, d’autres secteurs restent en souffrance, notamment l’électricité, où seulement 26 % des jeunes se déclarent satisfaits, un chiffre en écho direct aux crises de fourniture qui secouent Libreville.
Le rapport met aussi en garde : l’optimisme actuel pourrait s’effondrer si les promesses de développement, d’équité et de transparence ne sont pas rapidement matérialisées.
Le test de la cinquième République : transformer l’espoir en progrès concret
Au-delà des chiffres, ce regain d’espoir est un capital politique rare. Il constitue pour les autorités de Transition une opportunité, mais aussi une responsabilité historique : répondre aux attentes d’une jeunesse qui veut croire à un nouveau récit national mais refuse désormais les illusions.
Si le Gabon veut confirmer cette dynamique positive, il lui faudra produire des résultats visibles : emplois, gouvernance exemplaire, stabilité énergétique, transparence budgétaire et équité économique. Sans cela, la fenêtre d’optimisme ouverte depuis le 30 août pourrait se refermer aussi vite qu’elle s’est ouverte.









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