Gabon : l’État resserre la vis budgétaire face à une dette proche de 7 200 milliards de FCFA

Alors que la dette publique frôle les 7 200 milliards de FCFA, le gouvernement gabonais durcit sa politique de rigueur. Entre maîtrise des dépenses, audit des exonérations et discipline fiscale, la marge de manœuvre budgétaire s’amenuise, posant la question centrale : jusqu’où l’État pourra-t-il tenir sans étouffer la relance économique ?
Une trajectoire budgétaire de plus en plus contrainte. Le Gabon évolue aujourd’hui sur une ligne de crête budgétaire. Selon les données de la Direction générale de la dette, l’encours global atteignait 7 179 milliards de FCFA à fin mars 2025, soit près de 73 % du PIB, contre 70,6 % un an plus tôt. Cette progression s’explique par la combinaison de plusieurs facteurs : coûts d’emprunt élevés, accumulation d’arriérés, et surtout, poids croissant de la masse salariale, qui absorbe près de 40 % des dépenses courantes de l’État.
La dette, un fardeau structurel
Face à cette dérive, le ministère de l’Économie, conduit par Henri-Claude Oyima, a engagé une série de mesures d’assainissement. Parmi elles : le gel de toutes les exonérations fiscales non justifiées, l’audit des régimes dérogatoires et la rationalisation des dépenses administratives. Objectif affiché : restaurer la soutenabilité budgétaire sans compromettre le financement des investissements productifs.
Le service de la dette publique représente désormais l’un des postes les plus lourds du budget de l’État. En 2025, il est estimé à plus de 900 milliards de FCFA, soit une progression de 12 % sur un an. Dans un contexte marqué par la baisse des recettes pétrolières et la contraction des marges fiscales, le risque est réel : celui d’une compression des dépenses sociales et d’investissement au profit du remboursement des créanciers.
Entre discipline et relance, l’équilibre fragile
Les dernières annonces du gouvernement traduisent une volonté de rétablir la confiance des bailleurs internationaux. Le projet de loi de finances 2026 prévoit une baisse graduelle du déficit, appuyée par la digitalisation du recouvrement fiscal et la lutte contre la fraude. Mais ce tournant austéritaire risque de freiner la reprise de secteurs encore fragiles – BTP, PME, agriculture – déjà affectés par la réduction des transferts publics et le ralentissement des paiements administratifs.
La question devient donc politique : comment concilier rigueur budgétaire et relance économique dans un pays en transition ? Henri-Claude Oyima plaide pour une approche ciblée : « Aucun emprunt ne sera utilisé pour financer le fonctionnement. La dette doit servir exclusivement à financer des investissements structurants. »
Une réforme sous surveillance internationale
Dans un contexte où le Gabon cherche à regagner la confiance du FMI et des agences de notation, la discipline budgétaire est scrutée de près. L’agence Fitch Ratings a récemment jugé « optimistes » les hypothèses macroéconomiques du gouvernement, estimant que le déficit pourrait atteindre 25 % du PIB si les réformes tardent à produire leurs effets.
Le ministère de l’Économie a donc annoncé la création d’un Comité national de suivi des projets cofinancés et l’ouverture de comptes dédiés par projet, pour renforcer la traçabilité des dépenses publiques. Une initiative saluée par les partenaires techniques et financiers, mais qui devra être suivie d’actes concrets sur le terrain.
L’heure de vérité budgétaire
En 2026, le Gabon entrera dans une phase décisive : soit il parvient à stabiliser sa trajectoire d’endettement, soit il s’enferme dans une spirale où chaque franc collecté finance le passé plus que l’avenir. Entre rigueur imposée et attentes sociales, le gouvernement joue une partie serrée, où la crédibilité financière du pays et la cohésion sociale sont désormais intimement liées.
GMT TV