Gabon : le retour de l’exploitation de Kevazingo, un problème plus qu’une solution?
Le Gabon dispose d’une richesse non négligeable en termes de biodiversité. Son rôle crucial dans la préservation du bassin du Congo, se trouve à un carrefour décisif avec la récente annonce du gouvernement de transition concernant l’assouplissement des restrictions sur l’exploitation du kévazingo. Arborant une signification économique considérable, cette décision soulève néanmoins des préoccupations qui pourraient bien en faire un problème plus qu’une solution. Explications.
Le kévazingo, arbre emblématique du Gabon, avait été placé sous protection stricte en 2018 par le gouvernement de l’ancien président Ali Bongo, en réponse à une montée alarmante du trafic illégal. Cependant, un an après le coup d’État qui a conduit à l’instauration de la junte militaire estampillée CTRI, le gouvernement actuel a annoncé des mesures d’exploitation sous conditions. Bien que cela soit présenté comme une opportunité de développement économique, l’histoire du « Kévazingogate » soulève des doutes sur la capacité du pays à gérer cette ressource de manière responsable.
Risques Environnementaux
La décision d’autoriser l’exploitation du kévazingo comporte par ailleurs des risques environnementaux significatifs. Bien que le nouveau cadre réglementaire impose des conditions strictes, la rareté et la lenteur de la croissance de cette essence soulèvent des inquiétudes quant à la durabilité de son exploitation. Si des contrôles rigoureux ne sont pas instaurés et respectés, la survie de cette espèce emblématique pourrait être compromise.
Corruption et Marché Noir
Le contexte gabonais est également marqué par une histoire de corruption, particulièrement dans le secteur forestier. Les mesures de traçabilité, telles que le système de géoréférencement, sont essentielles, mais leur efficacité dépend de la volonté politique et de la rigueur administrative. Le risque persistant d’un marché noir florissant pourrait entraîner une exploitation illégale, minant ainsi les efforts de conservation et sapant les bénéfices économiques attendus.
Une économie en quête d’équilibre et de diversification
Si le potentiel économique du kévazingo est indéniable, avec des prix atteignant jusqu’à 3000 euros le mètre cube sur le marché international, et que sa valorisation pourrait significativement contribuer à l’économie gabonaise, son exploitation est loin d’être de tout repos. Si les bénéfices escomptés pourraient stimuler le développement des régions forestières et créer des emplois, cette perspective ne peut occulter les enjeux écologiques. La préservation de l’environnement doit rester au cœur de toute stratégie de développement, surtout dans le contexte mondial actuel.
Alors que le Gabon cherche à se positionner entre développement économique et préservation de l’environnement, le retour de l’exploitation du kévazingo est un enjeu majeur. Si les nouvelles régulations peuvent offrir une voie vers une exploitation plus responsable, les défis de la corruption, de l’inefficacité administrative et du marché noir demeurent des obstacles importants. Le succès de cette initiative dépendra de la capacité du gouvernement à établir un cadre de gestion solide et à appliquer des contrôles rigoureux. L’avenir du kévazingo, et celui des forêts du Gabon, est désormais entre les mains du CTRI, confronté à la nécessité d’agir de manière responsable et transparente.