Gabon : Le harcèlement, un danger pris à la légère

Dans le débat public autour des violences basées sur le genre et des agressions en milieu scolaire, une autre problématique souvent sous-estimée mérite d’être mise en lumière : le harcèlement. Ce phénomène, bien que répandu, demeure banalisé au sein de la société gabonaise, engendrant des conséquences aussi graves qu’invisibles.
Le harcèlement, tel que défini par les experts, se manifeste sous plusieurs formes, qu’il soit verbal, physique ou psychologique. De plus, avec l’essor des réseaux sociaux, le phénomène connaît une nouvelle dimension avec le cyberharcèlement, atteignant une portée insidieuse. Bien que ce fléau soit sanctionné par la législation gabonaise, il est paradoxalement normalisé dans certains contextes, notamment à l’école, sur le lieu de travail ou dans les interactions en ligne. Ce comportement est parfois perçu comme un moyen de « tester » la résistance de ses victimes ou comme une simple plaisanterie. Cependant, derrière cette façade se cache une violence profondément destructrice.
L’éclairage d’un spécialiste
Pour mieux comprendre ce phénomène, nous avons sollicité l’avis de Jocelyn Edzo Ndemezo’o, psychologue du travail et des organisations. Selon lui, plusieurs facteurs expliquent la persistance de cette minimisation du harcèlement au Gabon. Tout d’abord, le manque cruel de sensibilisation joue un rôle majeur. « Beaucoup de gens n’ont pas une réelle compréhension de ce qu’est le harcèlement », affirme-t-il. Des attitudes, bien qu’inappropriées, sont souvent considérées comme des plaisanteries innocentes.
En outre, la culture de l’impunité est un frein significatif. Les auteurs de harcèlement sont rarement sanctionnés et l’inaction des autorités contribue à faire du problème une préoccupation secondaire. Jocelyn Edzo Ndemezo’o attire également l’attention sur le poids des traditions et des dynamiques hiérarchiques au sein de la société gabonaise. Dans ce contexte, contester une autorité ou dénoncer un individu influent est souvent perçu de façon négative. « Lorsqu’un harceleur jouit d’une certaine notoriété, il devient d’autant plus difficile pour la victime de se manifester », précise-t-il.
Un autre aspect préoccupant demeure le silence qui entoure les victimes de harcèlement. Souvent paralysées par la peur du jugement, des représailles, ou la crainte de ne pas être crue, nombreuses sont celles qui choisissent de garder le silence. La stigmatisation est encore plus forte envers celles qui choisissent de briser ce silence.
De la nécessité d’intensifier la sensibilisation autour du harcèlement
Face à cette réalité alarmante, il devient impératif de revenir aux valeurs fondamentales et d’intensifier les campagnes de sensibilisation autour de ce fléau qu’est le harcèlement. Si aucune action n’est entreprise, les conséquences pourraient s’avérer tragiques, car nombreuses sont les victimes pour qui le suicide apparaît comme la seule échappatoire vers la paix.
Dans ce contexte, il est essentiel de susciter un débat ouvert et constructif afin de sensibiliser la population aux dangers du harcèlement. La société gabonaise doit se mobiliser pour créer un environnement où chacun se sent libre de s’exprimer sans craindre la violence ou la stigmatisation.
GMT TV