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Gabon : avec plus de 80% de recrutements directs, l’administration plus que jamais aux mains des « copains et coquins »

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« Je souhaite une administration proactive, respectable et respectée ». Tel était le souhait du président déchu Ali Bongo Ondimba. Chantre de la bonne gouvernance dans ses discours, mais agissant de façon contraire, l’ex numéro 1 gabonais a entretenu un phénomène qui aujourd’hui coûte chaque année près de 700 milliards de FCFA à l’Etat, à savoir: les recrutements directs au sein de l’administration publique. Bien que ne répondant pas aux normes en vigueur, comme l’a d’ailleurs révélé le recensement biométrique des agents à travers son rapport édifiant, ces recrutements directs représentent jusqu’à 80% des entrées effectuées dans une administration pourtant loin d’être efficace. 

27ème pays en matière de gouvernance selon l’indice Mo Ibrahim, le Gabon peine à créer les conditions d’une économie et d’une société portées vers la modernisation, le progrès et la performance. En cause, une administration publique classée parmi les pires du continent (49ème) et qui malgré le nombre important de ses agents (plus de 103 000 selon les données officiels) et la caractère budgétivore qu’ils représentent (plus de 700 milliards de FCFA par ans), peine à fournir les résultats attendus aussi bien en termes d’efficacité de la collecte des recettes fiscales, de lutte contre la corruption ou encore de transparence. 

Un rapport final du recensement biométrique mettant à mal la gestion au sein de l’administration

Mais pourquoi donc cette administration est aussi balbutiante ?  L’une des réponses à cette question se trouve dans le processus même de recrutement des agents. En effet, selon le rapport final du recensement biométrique, pas moins de 80% des agents sont issus d’un recrutement sur titre (ou recrutement direct) qui est pourtant censé être une exception puisque ne concernant que les emplois qui ne peuvent être pourvus par la voie du concours. Or, que ce soit dans l’éducation, la santé, la défense, l’économie et ses différents pans, la voie de concours devrait être privilégiée. 

Mieux encore, selon l’article 36 de la loi 8/91 du 26 septembre 1991, le concours est le seul moyen d’entrer à la Fonction Publique. Difficile donc de comprendre la volonté des responsables de l’administration de recourir de façon quasi systématique à des recrutements directs, souvent sur fond de « copains et coquins » témoignant des dérives de nombreux responsables de l’administration centrale. Avec seulement 20% des agents recrutés par voie de concours. Ces concours dont la réouverture ne s’est faite qu’il y a quelques semaines seulement, difficile donc de comprendre le volume actuel d’agents publics dont la masse salariale est passée de 683 à 685 milliards de FCFA entre 2020 et 2021. 


Échappant au contrôle du département ministériel dont il est la charge étant donné que le processus de recrutement direct n’est pas arrimé à une expression préalable des besoins de recrutement, cette pratique  effectuée en totale violation de la loi et qui au fil des ans a été élargie à l’ensemble des administrations créant au passage « une forme de recrutement incontrôlée » comme évoqué par les experts en charge du recensement, ne devrait donc plus avoir cours. Malheureusement, à l’heure de la restauration, le chemin est encore long à parcourir au regard des nombreuses nominations faites après chaque conseil des ministres.

Casimir Mapiya

« Mieux vaut une vérité qui fait mal, qu'un mensonge qui réjouit. » Proverbes berbères

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