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Gabon : À l’heure des félicitations de l’Union africaine, l’affaire Opiangah rappelle les défis de la cohésion nationale

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Alors que la Commission de l’Union africaine a salué l’élection de Brice Clotaire Oligui Nguema à la magistrature suprême du Gabon, dans un message empreint d’espoir et d’unité, certains dossiers judiciaires en suspens viennent rappeler que la cohésion nationale, évoquée dans ce communiqué diplomatique, ne saurait être un simple vœu pieux. L’affaire Hervé Patrick Opiangah, toujours pendante devant la chambre d’accusation, illustre avec acuité la tension persistante entre justice, politique et stabilité institutionnelle.

Dans son communiqué en date du 26 avril 2025, le président de la Commission de l’Union africaine, Mahamoud Ali Youssouf, a tenu à féliciter Brice Clotaire Oligui Nguema pour sa victoire électorale validée par la Cour constitutionnelle. Une reconnaissance officielle qui s’est accompagnée d’un appel fort : « La Commission réaffirme son engagement à soutenir pleinement le peuple gabonais dans sa quête légitime pour la paix, la prospérité et la cohésion nationale, pour bâtir ensemble l’Afrique que nous voulons. »

Cet appel à l’unité, lancé depuis Addis-Abeba, résonne d’autant plus fort dans un contexte où les fractures politiques et judiciaires peinent à se refermer. L’affaire Opiangah, désormais examinée par la chambre d’accusation de la Cour d’appel de Libreville, s’impose comme un test révélateur de la capacité des institutions à respecter les standards internationaux en matière de droits humains et d’indépendance de la justice.

Un dossier à la croisée de la justice et de la politique

Ancien ministre des Mines et chef d’entreprise influent, Hervé Patrick Opiangah vit depuis six mois en exil forcé. Ses avocats, Me Marc et Me Julien Bensimhon, ont saisi la Commission africaine des droits de l’Homme, dénonçant une procédure engagée sans plainte, sans preuve matérielle, et malgré le démenti formel de la supposée victime. « Ce dossier est un test pour l’indépendance de la justice gabonaise », avait souligné Me Julien Bensimhon dans une interview croisée avec notre confrère Dépêche241.

Plus grave encore, l’impact économique de cette affaire est dévastateur. Les entreprises de Sieur Opiangah, regroupées au sein de la Holding HPO & Associés, ont été fermées et placées sous scellés, privant de revenu plus de 6 500 salariés. « Ce n’est pas parce qu’un homme est accusé qu’on doit mettre au chômage autant de Gabonais », avait déploré l’avocat français au cours de cet entretien.

Pour une justice garante de la cohésion nationale

Dans ce climat post-électoral, la relance de la justice et le traitement impartial des affaires sensibles comme celle d’Hervé Patrick Opiangah sont perçus comme des indicateurs essentiels de la volonté des autorités à tourner la page des pratiques anciennes. La cohésion nationale, souvent invoquée mais rarement concrétisée, repose sur une exigence première : garantir à chaque citoyen, y compris les opposants politiques, le plein exercice de ses droits.

En saluant la transition institutionnelle gabonaise, la Commission de l’Union africaine a dressé les contours d’un horizon démocratique pour le pays. Mais pour que cet horizon se matérialise, encore faut-il que la justice se montre à la hauteur. À Libreville comme à Addis-Abeba, chacun sait que la cohésion nationale ne se décrète pas. Elle se construit. Par les actes. Par le droit. Et par l’exemple.

Henriette Lembet

Journaliste Le temps est une donnée fatale à laquelle rien ne résiste...

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