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Elections 2025 : Une transition pour rien, le vieux logiciel de la fraude et du transport d’électeurs toujours opérationnel !

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« C’est enfin notre essor vers la félicité », proclamait solennellement le Colonel Ulrich Manfoumbi Manfoumbi, le 30 août 2023, au nom du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI). Deux années plus tard, après un dialogue national, un référendum et une présidentielle à forte portée symbolique, les élections locales et législatives de ce 27 septembre 2025 auraient dû parachever la promesse de rupture. Elles n’en sont que la caricature. Pis, elles révèlent un système qui, sous des habits neufs, répète les pires travers de l’ancien régime.

Un scrutin gangrené par la manipulation et le transport d’électeurs. Partout, les scènes se ressemblent : des bus affrétés, des cartes électorales redistribuées comme des primes, des procurations aux contours flous. À Minvoul, un village proche de Bollossoville, habitué à 60 électeurs, s’est subitement retrouvé avec 230 électeurs supplémentaires, convoyés dans des bus aux plaques du Sud, sans aucune attache familiale ni économique dans la zone. À Libreville, Port-Gentil, Moabi ou Tchibanga, la situation est identique : des citoyens transformés en électeurs mercenaires, imposant aux populations locales des représentants qu’ils n’ont ni choisis, ni reconnus.

C’est une négation frontale de la souveraineté populaire. Un viol méthodique de l’idéal démocratique. Un simulacre électoral au goût amer pour les véritables bâtisseurs de la République. Que vaut une victoire, quand elle repose sur des scrutins verrouillés, des procurations suspectes, des listes électorales truffées de morts, et des bureaux de vote monopolisés par une seule formation politique ? Certainement pas une légitimité. Encore moins une espérance.

La démocratie détournée, la rupture reniée

Le 30 août 2023 devait être un séisme réparateur. Il devient, à la lumière de ce scrutin, un simple sursaut cosmétique. Ce samedi 27 septembre, nous avons assisté non pas à un exercice électoral sincère, mais à une reconstitution méthodique de l’appareil politique hérité du régime Bongo. La majorité des candidats investis dans certaines localités sont d’anciens barons du Parti Démocratique Gabonais (PDG) recyclés dans des formations dites « de rupture », et parfois même portés par les moyens de l’État.

Peut-on prétendre restaurer la confiance en la démocratie en recyclant ceux qui l’ont sabotée ? Peut-on bâtir un avenir commun sans justice mémorielle ? Peut-on, en toute bonne foi, laisser les artisans du désastre d’hier devenir les gestionnaires de demain, sans autocritique, sans reddition de comptes, sans le moindre symbole de transformation ?

« Une victoire construite sur du mensonge ne présage rien de bon »

Ces mots de Raymond Ndong Sima, ancien Premier ministre de la transition, sonnent aujourd’hui comme une sentence prémonitoire. Une élection biaisée est une défaite collective. Elle trahit le peuple, elle abîme l’État, elle défigure la République. Elle n’est pas seulement une imposture politique. Elle est un recul historique.

Le scrutin du 27 septembre 2025 n’a pas sanctuarisé la démocratie gabonaise. Il a fragilisé la transition. Il n’a pas conforté la légitimité du pouvoir d’Oligui Nguema. Il l’a brouillée. Il n’a pas consacré une rupture. Il a consacré un recyclage cynique des pratiques qui, des années durant, ont fragilisé notre démocratie en construction.

Un appel solennel à la conscience républicaine

Nous, journalistes, acteurs de la société civile, électeurs ordinaires, ne devons pas être les complices silencieux d’un retour en arrière. La mémoire du 30 août n’appartient pas aux militaires. Elle appartient au peuple dans toute sa diversité. Elle est sacrée. Elle ne peut être dévoyée par des calculs partisans ou des arrangements d’arrière boutique.

Que reste-t-il aujourd’hui de « l’essor vers la félicité » promis au peuple ? Un slogan ? Un mirage ? Une illusion trahie ? Si le président Brice Clotaire Oligui Nguema veut écrire une page nouvelle, qu’il commence par reconnaître les dérives de ce scrutin, annuler les circonscriptions entachées, restaurer l’équité, et mettre fin à la mascarade du transport d’électeurs. Identifier les auteurs, les poursuivre et prononcer leur inéligibilité pour clarifier l’expression démocratique, brouillée par ces pratiques qui fragilisent le vivre-ensemble.  Sinon, il devra assumer d’être passé, malgré lui peut-être, de libérateur à restaurateur d’un système qu’il disait honnir.

Harold Leckat

Juriste contentieux, Fondateur et Directeur de publication. "La chute n'est pas un échec. L'échec est de rester là où l'on est tombé ", Socrates

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