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Afrobarometer : grandes villes, épicentres de l’insécurité

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Au Gabon, l’insécurité n’est pas vécue de la même manière selon que l’on habite Libreville, Port-Gentil ou dans un village reculé. Les données d’Afrobarometer révèlent que ce sont les citadins et les populations les plus pauvres qui se sentent le plus exposés aux violences et aux crimes. Une fracture sociale et territoriale qui met au défi les politiques publiques de sécurité.

L’urbanisation, terrain fertile de l’insécurité. Près de deux tiers des Gabonais (64%) disent s’être sentis en insécurité dans leur quartier au moins une fois en 2021, mais ce sentiment est nettement plus marqué en ville. Dans les zones urbaines, plus d’un habitant sur deux déclare avoir craint pour sa sécurité, contre environ un tiers dans les zones rurales. La densité de population, l’anonymat des grandes villes et l’insuffisance des patrouilles renforcent le climat de vulnérabilité.

À Libreville, certains quartiers entiers restent plongés dans l’obscurité faute d’éclairage public fonctionnel, offrant un terreau idéal aux agressions. « Quand il fait nuit, rentrer à pied c’est prendre un risque. Les lampadaires sont cassés depuis des mois », témoigne un jeune étudiant de Nzeng-Ayong.

La pauvreté, multiplicateur de peur

L’enquête établit également un lien direct entre pauvreté vécue et sentiment d’insécurité. 72% des Gabonais les plus pauvres estiment que la plupart des policiers sont corrompus, contre 63% parmi les plus aisés. De la même manière, 56% des plus démunis déclarent s’être sentis en insécurité dans leur quartier, contre 38% des mieux lotis. La précarité amplifie donc non seulement l’exposition aux risques, mais aussi la méfiance envers les institutions censées protéger.

Dans certains quartiers périphériques, l’absence d’infrastructures de base (routes, éclairage, commissariats de proximité) renforce ce sentiment d’abandon.

Quelles réponses locales ?

Face à cette géographie sociale de la peur, des solutions ciblées s’imposent. Renforcer la présence policière là où le sentiment d’insécurité est le plus fort, mais aussi investir dans l’éclairage public, l’urbanisme de proximité et les services de base. Car la sécurité ne se résume pas aux barrages routiers : elle se construit aussi avec des rues éclairées, des espaces publics entretenus et une police de quartier proche des citoyens.

L’expérience de certaines capitales africaines montre qu’une combinaison de patrouilles ciblées et de politiques urbaines inclusives peut réduire significativement la criminalité. Le Gabon a donc une feuille de route claire : sécuriser ses villes et accompagner ses populations les plus vulnérables.

Une fracture politique à combler. Au-delà des chiffres, c’est une question de cohésion nationale : un pays où les pauvres et les citadins se sentent constamment en danger est un pays fragilisé dans sa stabilité même. La sécurité doit redevenir un droit, et non un privilège réservé aux quartiers protégés.

Casimir Mapiya

« Mieux vaut une vérité qui fait mal, qu'un mensonge qui réjouit. » Proverbes berbères

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