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Afrobarometer : des citoyens contraints de «saluer le Képi du chef» pour obtenir de l’aide

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Dans un contexte où la sécurité constitue un enjeu majeur pour les citoyens, le réseau panafricain et indépendant de recherches Afrobarometer révèle dans sa dépêche n° 1037 des données troublantes sur la réalité de l’interaction entre la population et les forces de sécurité au Gabon. Les équipes de terrain de cette organisation à but non lucratif ont mené une collecte de données rigoureuse, mettant en lumière l’impact de la présence des forces de sécurité sur le sentiment de sécurité des populations.

Prenant tout d’abord l’aspect lié à la présence policière ou sécuritaire, Afrobarometer relève que 27 % des zones de dénombrement visitées abritaient des postes de police ou de gendarmerie. En parallèle, la présence de policiers ou de véhicules de sécurité a été constatée dans 49 % des ZD explorées, tandis que des membres de l’armée étaient visibles dans 36 % des zones. Ces chiffres témoignent d’une militarisation croissante des espaces publics, dont le but affiché est généralement de renforcer la sécurité. Pourtant, cette présence soulève des questions quant à sa fonction réelle et à son impact sur le quotidien des Gabonais.

En effet, l’étude d’Afrobarometer va au-delà de l’énumération des chiffres. Elle révèle un constat alarmant : parmi les citoyens ayant eu recours à l’aide de la police, 61 % d’entre eux ont jugé qu’il était « difficile » ou « très difficile » d’obtenir l’aide nécessaire. Dans un pays où la confiance envers les forces de l’ordre semble remise en question, cette difficulté d’accès à l’aide pose un sérieux problème.

La corruption comme moyen d’obtention de l’aide policière

Pire encore, la nécessité de recourir à la corruption pour obtenir une aide policière a été confirmée par 51 % des personnes ayant sollicité l’assistance des forces de l’ordre. Le versement de pots-de-vin ou la nécessité d’offrir des cadeaux pour obtenir le soutien des policiers illustrent des pratiques déconcertantes qui gangrènent l’intégrité des institutions. Au total, 22 % des adultes gabonais ont admis avoir payé des pots-de-vin pour recevoir de l’aide, pour éviter un problème avec la police, ou les deux.

Ces résultats soulignent un malaise au sein des forces de sécurité, qui, loin d’incarner la confiance et la protection, semblent devenir des acteurs de défiance. Face à des citoyens contraints de « saluer le Képi du chef » pour espérer une aide, la question de la réforme des institutions de sécurité s’impose avec acuité.

La problématique de l’accès à l’aide policière, couplée à la corruption, appelle à une réflexion collective sur les mécanismes à mettre en place pour restaurer la confiance entre les citoyens et leurs protecteurs. Ce rapport d’Afrobarometer met en exergue l’importance de réformer les approches sécuritaires et d’instaurer des pratiques plus transparentes et accessibles dans le but de garantir un véritable sentiment de sécurité au sein de la population gabonaise.

Henriette Lembet

Journaliste Le temps est une donnée fatale à laquelle rien ne résiste...

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