Gabon : aller au-delà de la caravane touristique pour réveiller le voyage intérieur

Alors que le ministère du Tourisme multiplie les initiatives pour relancer le secteur, à l’image de la Caravane touristique lancée sous l’impulsion de Pascal Ogowe Siffon, une question demeure : comment faire du tourisme domestique un véritable levier de développement national ? Le défi est autant culturel qu’économique.

À Libreville, nombreux sont les habitants qui n’ont jamais mis les pieds à Ntoum, pourtant située à moins d’une heure de route. Ce constat, symptomatique d’un désintérêt profond pour le tourisme local, illustre le paradoxe d’un pays aux paysages spectaculaires, mais encore méconnu de ses propres citoyens.

Un trésor national que les Gabonais ne connaissent pas

Malgré sa biodiversité exceptionnelle et ses parcs classés au patrimoine mondial de l’UNESCO, le Gabon peine à susciter un véritable engouement national pour ses richesses touristiques. Le problème tient à plusieurs facteurs : manque d’information, infrastructures inadaptées, coûts perçus comme prohibitifs et une mentalité tournée vers l’extérieur. « Beaucoup de nos concitoyens préfèrent voyager à l’étranger plutôt que de découvrir la Lopé, les chutes de Kongou ou la baie de Corisco », déplore un opérateur du secteur.

Aller au-delà des campagnes de communication. Le ministère du Tourisme durable a bien lancé des formules spéciales et des offres de découverte avec des partenaires privés. Mais, selon les acteurs du secteur, il faut désormais aller plus loin : investir dans les routes, les transports, les hébergements de proximité et surtout encourager les initiatives communautaires.

Pour Serge Mihindou, analyste du secteur, cité par le magazine de Croissance saine environnement « la relance du tourisme domestique passe par la valorisation des acteurs locaux : artisans, restaurateurs, guides et hôteliers. Ce sont eux qui font vivre l’expérience authentique ».

Créer un réflexe de voyage national

Promouvoir le tourisme intérieur, c’est aussi créer un sentiment d’appartenance et de fierté nationale. Des festivals, journées portes ouvertes et campagnes de sensibilisation dans les écoles pourraient inciter les jeunes à découvrir leur pays. La mise en place de forfaits attractifs, de plateformes numériques d’information touristique et d’aides financières aux établissements d’accueil apparaît aujourd’hui comme une nécessité stratégique pour revitaliser la filière.

Du voyage au patriotisme économique. Au-delà des retombées économiques, le tourisme local participe à la cohésion nationale. En redécouvrant le Gabon, ses forêts, ses lacs et ses traditions, les citoyens se reconnectent à leur identité collective.

Le tourisme, s’il est structuré et soutenu, peut devenir un puissant instrument de développement durable et de fierté nationale. Encore faut-il, comme le souligne un professionnel du secteur, « que les Gabonais cessent de voir leur pays comme un simple lieu de résidence, mais comme une destination à explorer ».