Réseaux sociaux : le choix radical du Danemark interpelle le Gabon
Alors que le Danemark vient d’interdire l’accès à plusieurs réseaux sociaux aux jeunes de moins de 15 ans, une décision qualifiée d’historique en Europe, cette mesure relance au Gabon le débat sur l’impact des plateformes numériques sur les violences scolaires, la consommation de drogue, la prostitution juvénile et les grossesses précoces.
Annoncée le 7 novembre 2025, la réforme danoise, rapportée par La Presse, vise à protéger les enfants d’une exposition précoce aux contenus nocifs et aux mécanismes addictifs des réseaux sociaux. Le ministère de la Numérisation, à l’origine du texte, a expliqué qu’un âge minimum serait désormais exigé pour créer un compte sur des plateformes comme TikTok, Facebook, Instagram, Snapchat, Reddit ou X. Les parents pourront toutefois accorder une autorisation spéciale dès 13 ans après une évaluation stricte.
Une réponse ferme au dérapage numérique des adolescents
Le Danemark s’inscrit dans la dynamique lancée fin 2024 par l’Australie, premier pays au monde à interdire les réseaux sociaux aux moins de 16 ans. « Les enfants ne doivent pas être laissés seuls dans un monde numérique où les contenus préjudiciables et les intérêts commerciaux influencent leur quotidien », a rappelé Copenhague, ajoutant que les plateformes risqueront désormais jusqu’à 50 millions de dollars australiens d’amende en cas de manquements.
Cette décision vise à limiter l’exposition aux contenus violents, hypersexualisés, addictifs ou anxiogènes, mais aussi à protéger la santé mentale des adolescents face à une pression sociale croissante.
Et au Gabon ? Le numérique, révélateur et amplificateur d’un malaise social
Si ce débat semble lointain, il résonne pourtant fortement au Gabon. Depuis plusieurs années, les réseaux sociaux sont devenus un miroir — parfois déformant, souvent brutal — des dérives qui touchent la jeunesse :
violences scolaires filmées et diffusées, défis dangereux, banalisation de la drogue, notamment le cannabis et les produits pharmaceutiques détournés, sexualisation précoce, prostitution déguisée des mineures, grossesses précoces, souvent encouragées par la pression numérique et l’exposition à des contenus explicites.
Dans certains établissements scolaires, la viralité des vidéos de bagarres entretient un climat d’insécurité. Les jeunes filles, parfois mineures, se retrouvent au cœur de réseaux de “sugar daddies” digitalisés via Instagram, WhatsApp ou Facebook. Quant aux drogues, elles circulent désormais via des messages chiffrés ou des groupes privés.
Le numérique n’est plus seulement un espace d’expression : il est devenu un catalyseur des dérives sociales, un lieu où l’absence de régulation crée un terrain dangereux.
Faut-il envisager une régulation gabonaise inspirée du modèle danois ?
Le Gabon n’a pour l’instant aucune législation spécifique limitant l’âge d’accès aux réseaux sociaux. Les opérateurs locaux n’imposent aucune vérification d’identité, laissant les collégiens et même les élèves du primaire ouvrir des comptes sans contrôle.
Pourtant, les enjeux sont immenses : protéger les mineurs des contenus violents et pornographiques ; réduire les incitations à la prostitution juvénile ; limiter la consommation de drogue orchestrée sur les plateformes ; lutter contre le cyberharcèlement ; restaurer l’autorité parentale et scolaire ; limiter l’érosion des performances scolaires causée par l’addiction numérique.
À l’heure où les violences dans les lycées se multiplient, où les grossesses précoces explosent (plus de 500 cas recensés en milieu scolaire en 2024), où les réseaux criminels s’organisent en ligne, la question d’un encadrement strict des usages numériques se pose avec urgence.
Un débat national à ouvrir d’urgence
Le modèle danois montre qu’une régulation ferme est possible et acceptée lorsqu’elle vise la protection des enfants.
Le Gabon, confronté à une montée inquiétante des dérives chez les jeunes, pourrait y puiser une inspiration pour bâtir un cadre légal protecteur, moderne et adapté à ses réalités.
À l’heure où la société s’inquiète de la dégradation de la jeunesse et du climat scolaire, l’encadrement du numérique pourrait devenir l’un des outils essentiels de prévention. Reste à savoir si les pouvoirs publics, les parents et les établissements scolaires ouvriront ce débat, avant que les dérives ne deviennent irréversibles.








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