A La UneDerniers articlesEditorialPOLITIQUE

Présidentielle 2025 : Quel avenir pour Oligui Nguema élu président sans parti politique ?

Ecouter l'article

Avec la montée des candidatures indépendantes et l’effacement des partis politiques traditionnels, le futur président du Gabon devra affronter un défi de taille : gouverner un pays sans véritable structure politique pour l’accompagner. Cette situation, si elle semble offrir une plus grande liberté d’action au chef de l’État, présente un risque majeur : celui d’un isolement institutionnel et d’une gouvernance personnalisée, sans ancrage durable ni relais politiques pour structurer l’action publique. Dès son élection, le président devra poser les bases d’un nouvel équilibre politique afin de ne pas transformer cette indépendance en une fragilisation du pouvoir.

Reconstruire une dynamique politique structurée. Un chef d’État ne peut pas gouverner seul. Même s’il est élu sans l’appui d’un parti, il devra rapidement structurer un cadre politique stable pour assurer la gouvernabilité du pays. L’une des premières décisions stratégiques consistera à repenser le rôle des partis politiques en leur redonnant une place dans le jeu institutionnel. Cela ne signifie pas un retour au passé, mais plutôt une réforme en profondeur du paysage politique, pour éviter que l’indépendance présidentielle ne devienne un facteur d’instabilité.

Le président élu devra favoriser la création ou la refondation d’un mouvement politique fort, non pas comme un simple instrument électoral, mais comme un véritable espace de débat et de construction des politiques publiques. Cette dynamique peut passer par l’ouverture d’un dialogue avec les partis existants, y compris ceux affaiblis par leur absence dans cette élection, afin de structurer un socle de soutien institutionnel capable de donner une cohérence à l’action gouvernementale.

Rétablir la confiance des citoyens dans la politique

L’érosion de la crédibilité des partis politiques a nourri un désintérêt massif de la population pour la chose publique. Les Gabonais se sentent trahis par des décennies de promesses non tenues et de gestion opaque du pouvoir. Le futur président ne pourra pas se contenter de perpétuer les pratiques du passé ; il devra engager une politique de rupture claire, fondée sur la transparence, la concertation et la participation citoyenne.

La réhabilitation de la confiance passera par une transformation du rapport entre le pouvoir et le peuple. Il ne s’agit plus de gouverner de manière descendante, mais d’intégrer la société civile dans la prise de décision. Des initiatives comme les consultations citoyennes, les débats publics ouverts et la mise en place de mécanismes de contrôle démocratique pourraient contribuer à restaurer un lien de confiance.

Instaurer un État fondé sur les compétences et non sur le clientélisme

Une autre faiblesse du système politique gabonais a toujours été la confusion entre pouvoir politique et gestion des institutions. Le futur président devra s’affranchir du réflexe de noyauter l’administration avec des fidèles et des alliés opportunistes, au risque de reproduire les erreurs du passé.

L’un des défis majeurs pour le futur président sera de réformer la gouvernance en plaçant la compétence et l’efficacitéau centre de l’action publique. Il s’agira de bâtir un État rigoureux et performant, capable d’exécuter les politiques sans interférences partisanes et avec une administration véritablement indépendante. Pour y parvenir, une série de mesures devra être engagée, à commencer par un audit approfondi des institutions afin d’identifier les blocages et les inefficacités qui entravent leur bon fonctionnement.

 La composition du gouvernement devra être fondée sur l’expertise et la compétence, plutôt que sur des logiques de fidélité politique. Enfin, une réforme de l’administration s’imposera pour s’assurer que les décisions prises au sommet soient appliquées avec rigueur et efficacité sur le terrain, rétablissant ainsi la crédibilité de l’État auprès des citoyens.

Encadrer l’action des associations et éviter une gouvernance informelle

L’un des dangers qui guette le futur président sera la tentation de s’appuyer sur les associations politiques opportunistes qui ont émergé durant la campagne. Ces structures, souvent créées pour se positionner dans l’ombre du pouvoir, risquent de fausser le jeu démocratique et d’encourager une gouvernance parallèle, dominée par des intérêts particuliers plutôt que par l’intérêt général.

Si ces associations ont su capter une partie du débat public, elles ne doivent en aucun cas remplacer les institutions officielles. Le futur président devra donc veiller à réguler et encadrer ces mouvements, en imposant des critères de transparence et de responsabilité pour éviter qu’ils ne deviennent des instruments de clientélisme politique.

Créer une nouvelle dynamique politique : rupture ou recomposition ?

Le Gabon est à un tournant de son histoire politique. L’élection de 2025 sera marquée par une recomposition du pouvoir, mais cette recomposition doit être structurée pour éviter le chaos institutionnel. Le président élu, bien qu’indépendant, devra prendre des décisions fortes pour reconstruire un cadre politique viable.

Plutôt que de s’appuyer sur une gouvernance solitaire, il devra favoriser l’émergence d’une nouvelle dynamique politique, où les institutions reprennent leur place, où les partis sont rénovés et adaptés aux défis actuels, et où la population est associée aux décisions majeures.

Ce défi est immense. Mais s’il est relevé avec audace et responsabilité, il pourrait marquer le début d’un véritable renouveau démocratique pour le Gabon.

Harold Leckat

Juriste contentieux, Fondateur et Directeur de publication. "La chute n'est pas un échec. L'échec est de rester là où l'on est tombé ", Socrates

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

GMT TV

Bouton retour en haut de la page