Petite leçon de chose politique : inviter les partis politiques à respecter l’obligation de la levée et descente des drapeaux
Faut-il exonérer les partis politiques gabonais de l’obligation de la levée et descente des drapeaux ? La question ainsi posée peut, de prime abord, obéir à une réponse négative. En effet, cette obligation ne saurait peser sur les partis politiques dans la mesure où, en tant qu’organes privés, ils n’exercent pas directement une activité d’intérêt général. Cela étant, l’obligation de la levée et la descente des drapeaux ne devrait donc peser que sur les administrations (écoles, lycées, collèges, universités, fonction publique, ministère des finances…) et institutions politiques (Présidence de la République, Parlement, etc.) parce qu’elles assurent des activités d’intérêt général, et représentent donc directement l’État.
Pourtant, une analyse approfondie des droits et devoirs des partis politiques dans un État, et particulièrement au Gabon, permet de relativiser cette affirmation. L’article 6 de la Constitution du 26 mars 1991, à titre d’exemple, s’inscrit dans cette logique lorsqu’il affirme que « [l]es partis politiques et les groupements politiques légalement reconnus concourent à l’expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement, dans le cadre fixé par la loi, selon les principes du multipartisme. Ils contribuent à l’égal accès des femmes, des hommes, des jeunes et des handicapés aux mandats électoraux, dans les conditions fixées par la loi. Ils doivent respecter la Constitution, les lois et règlements de la République ». De cette disposition ressort l’idée selon laquelle les partis politiques doivent, au même titre que les institutions publiques et l’administration, respecter la légalité républicaine et concourir au raffermissement de l’État de droit et de la démocratie. On avancera alors que l’obligation de la levée et descente des drapeaux doit s’imposer à eux pour trois raisons au moins.
D’abord, en respectant cette obligation, les partis politiques affirmeraient clairement leur attachement aux symboles de la République. Il s’agit précisément de deux symboles consacrés à l’article 2 de la Constitution de 1991 : le drapeau tricolore, « vert, jaune, bleu », à trois bandes horizontales, d’égale dimension, et l’hymne national, « La Concorde ». A contrario, les exonérer de l’obligation susmentionnée reviendrait, à notre sens, à faire une promotion timorée des symboles de la République. Or, au regard du contexte politique actuel, il est plus que nécessaire d’inciter tout citoyen, peu importe son bord politique, à respect ces symboles. Il en est de même des valeurs de la République.
En effet, il serait légitime d’imposer aux partis politiques la pratique de la levée et descente des drapeaux parce qu’elle constitue aussi un moyen d’inculquer les valeurs républicaines à leurs adhérents, et donc aux Gabonais. La principale valeur visée par cet acte est le patriotisme. Consacré à l’article premier de la Charte de la Transition du 2 septembre 2024, le patriotisme s’entend comme l’amour de la patrie. La manière d’exprimer cet amour étant décrite par l’hymne national, La Concorde, il importe alors d’inviter tous les acteurs politiques à lever et descendre les drapeaux afin que le patriotisme soit gravé dans leurs cœurs.
Enfin, les partis politiques doivent respecter l’obligation de la levée et descente des drapeaux parce qu’ils participent à la conscientisation de la population. Ainsi, en s’assurant que leurs adhérents respectent l’obligation susmentionnée, les partis politiques contribueront assurément au raffermissement du vivre-ensemble, de l’État de droit et de la démocratie au Gabon.
Patrice MOUNDOUNGA MOUITY,
Professeur de Science politique à l’Université Omar Bongo et à l’EM Gabon-Université,
Député à l’Assemblée Nationale de la Transition, Membre du Secrétariat Exécutif du Parti Démocratique Gabonais (PDG).