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Libreville : derrière l’Assemblée nationale, des familles déguerpies livrées à elles-mêmes

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À la lisière du Boulevard Triomphal, derrière la barrière de l’Assemblée nationale, se joue un drame social passé presque sous silence. Déguerpis dans la foulée des casses de Plaine-Orety, plusieurs dizaines de familles vivent depuis près de trois mois dans des abris de fortune, sans relogement ni indemnisation. Une situation qui met en lumière les failles de la politique d’aménagement urbain et pose une question lourde : que vaut la parole de l’État face à ses propres citoyens ?

Des abris de fortune en plein cœur de la capitale. À quelques mètres seulement du Palais Léon Mba, des pères et mères de famille, accompagnés d’enfants contraints de dormir à la belle étoile, survivent dans des cases bricolées avec des tôles rouillées, des planches déchiquetées et de vieux sacs plastiques. Pas de latrines, pas de sanitaires, et pour seule eau potable, celle qui s’échappe de tuyauteries laissées ouvertes après la destruction des bâtiments.

« On dort depuis plus de deux mois à la belle étoile. Nos enfants sont éparpillés chez des connaissances. La rentrée scolaire approche, que vont-ils devenir ? », s’interroge, amer, Élie Pambou, l’un des sinistrés.

« Nous avons été détruits par erreur »

Ce qui choque davantage, c’est que selon les habitants, leur zone ne figurait pas sur la liste officielle des sites concernés par le projet de démolition. « On nous a vraisemblablement cassés par erreur. Mais depuis lors, aucune autorité n’est venue, aucun ministre, même pas les députés dont les bureaux sont à quelques mètres », témoigne un occupant sous anonymat.

Brice Aboghe, président du collectif des sinistrés du Carrefour Mack Joss, abonde : « Notre site n’avait jamais été recensé, numéroté ni indemnisé. Nous avons déposé tous les documents, mais rien n’a bougé. »

Une violation des droits constitutionnels

Au-delà du drame humain, les victimes rappellent leurs droits. « Nous sommes traités comme si nous n’étions pas Gabonais », dénoncent-elles, invoquant l’article 20 de la Constitution, qui prévoit une indemnisation pour toute expropriation. À la veille de la fête nationale du 17 août et de la commémoration du Coup de libération du 30 août, ces familles interpellent directement le président de la République et le gouvernement sur leur sort.

Quand la dignité des citoyens est en jeu

Ce drame, à moins de 100 mètres du Parlement, illustre un paradoxe cruel : alors que le pays affiche des ambitions de modernisation et de relance, certains citoyens dorment dans des conditions indignes, « traités comme des étrangers dans leur propre pays ».

Le silence des autorités sur cette situation risque d’accentuer le sentiment d’abandon et de défiance envers l’État. Pour ces familles, l’urgence est claire : un relogement digne, une indemnisation juste, et le respect de leur droit fondamental à la dignité.

Henriette Lembet

Journaliste Le temps est une donnée fatale à laquelle rien ne résiste...

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