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Gabon : vers une suppression du Conseil national de la démocratie ? 

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Le débat autour de la révision de la loi 24/96 du 6 juin 1996 relative aux partis politiques a remis en lumière plusieurs dysfonctionnements affectant certaines institutions. Parmi elles, le Conseil national de la démocratie (CND), dont la suppression a été demandée par les Gabonais à l’issue des travaux du Dialogue national inclusif (DNI), organisé en mars 2024 au stade d’Angondjé.

Créé le 15 avril 1996 par la loi 13/96 et effectivement installé en 1997, le CND a pour mission d’assurer l’équilibre du jeu démocratique. Or, les prochaines discussions sur la réforme du cadre de fonctionnement des partis politiques pourraient remettre en cause son existence, dans la droite ligne du discours prononcé par le chef de l’État le 7 mai dernier, devant les représentants des 104 partis légalement reconnus. « Je n’y suis pour rien, pour maintenir un parti politique, il faut avoir au moins 5 parlementaires et 30 élus locaux », avait alors affirmé Brice Clotaire Oligui Nguema.

Un bureau du CND contesté

Outre l’utilité contestée de l’institution par de nombreux citoyens, le Conseil national de la démocratie souffre d’une profonde crise de légitimité interne. À sa tête, Séraphin Ndaot Rembogo occupe la présidence de manière controversée depuis sa reconduction par le décret présidentiel n°250/PR du 21 août 2017. Saisie par le Premier ministre de la Transition d’alors, Raymond Ndong Sima, la Cour constitutionnelle a pourtant ordonné « aux autorités compétentes de nomination de procéder à la mise en place, en temps opportun, de l’ensemble des organes du Conseil National de la Démocratie ». Une injonction restée sans effet plus d’un an plus tard, accentuant la perte de crédibilité de cette entité censée être indépendante.

Par ailleurs, l’un des arguments majeurs ayant conduit les commissaires du Dialogue national à préconiser la suppression du CND réside dans le déficit de représentativité de la majorité des partis. En effet, nombre de formations légalement enregistrées peinent à démontrer l’existence d’une base militante réelle, et donc d’une légitimité démocratique. En outre, certaines structures fonctionnent selon des logiques de succession familiale. C’est le cas de l’ARENA, désormais dirigé par la veuve de feu Richard Moulomba, bien qu’elle se déclare étrangère aux affaires politiques. De même, le Bloc démocratique chrétien a vu Anna Claudine Ayo succéder à son défunt époux. Autant de signes qui révèlent l’urgence d’une réforme en profondeur du paysage politique, à commencer par l’organe censé en garantir le bon fonctionnement.

Le CND sur la sellette

Malgré toutes ces critiques et bien que son fonctionnement coûte plus de 860 millions de Fcfa au contribuable, la suppression du CND ne fait pas l’unanimité, y compris parmi les responsables de partis politiques. En témoigne la réunion du 8 mai dernier, convoquée dans le cadre de la préparation des travaux de la commission chargée de réviser la loi 24/96 : les leaders présents y ont clairement exprimé leur volonté de préserver cet organe, estimant que c’est l’avenir même des partis politiques qui se joue au travers de cette réforme attendue par tous.

Il faut dire que les difficultés rencontrées par les partis, qui entravent le bon fonctionnement de notre démocratie, s’inscrivent dans un contexte général marqué par la prolifération d’associations se réclamant « apolitiques », mais dont l’absence se fait cruellement sentir lorsqu’il s’agit de défendre les principes de l’État de droit ou la justice sociale qu’elles prétendent incarner. Quoi qu’il en soit, les discussions à venir sur la réforme des partis politiques s’annoncent d’ores et déjà particulièrement intenses.

Karl Makemba

Engagé et passionné, Karl Makemba met son expertise et sa plume au service d’une information rigoureuse et indépendante. Fidèle à la mission de Gabon Media Time, il contribue à éclairer l’actualité gabonaise avec une analyse approfondie et un regard critique. "La liberté d'expression est la pierre angulaire de toute société libre." – Kofi Annan

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