Gabon : restructuration des entreprises publiques, ligne budgétaire nécessaire ou variable d’ajustement ?
Alors que des plans de réduction de la dette et des dépenses publiques sont attendus, pour notamment permettre un rééquilibrage à moyen terme et redresser la barre des finances publiques, plusieurs lignes budgétaires contenues dans la loi de finances 2024 continuent de susciter des interrogations. C’est le cas de la restructuration des entreprises publiques pour laquelle sont encore prévues cette année, 14,750 milliards de FCFA, en hausse de près de 5 milliards de FCFA par rapport à l’année précédente. Pourtant, ces entreprises publiques budgétivores peinent à produire les résultats escomptés, de « nombreux problèmes se posent par rapport à leur gouvernance, ainsi qu’à la maîtrise de la dépense publique en lien avec les transferts qui leurs sont dédiés » de l’aveu même du régime déchu. Alors qu’est ce qui explique cette persistance à les entretenir?
En 2019 et 2020, une mission du Fonds monétaire international (FMI) conduite par Boileau Loko, invitait les autorités gabonaises à revoir leur copie en matière de gestion des entreprises publiques. Pointée du doigt à cette époque, Gabon Oil Company (GOC), aujourd’hui en passe de rafler les actifs d’Assala Energy avec la bénédiction du CTRI dans une opération à plus de 800 milliards de FCFA et ce, malgré des problèmes de gestion et de gouvernance criants. Ces avertissements du FMI, principal créancier du pays avec 10% de l’encours, mettaient le doigt sur un problème spécifique, le budget alloué chaque année à la « restructuration des entreprises publiques ».
Il faut dire que celui-ci, se situe depuis une dizaine d’années entre 10 et 15 milliards de FCFA par an. Au total, ce sont donc entre 100 et 150 milliards de FCFA qui ont été injectés en dix ans seulement, pour « restructurer » les entreprises. Ces mêmes entreprises et autres structures publiques personnalisées, qui engloutissent déjà des subventions qui ont connu une augmentation, passant de 93,4 milliards de FCFA en 2019 à 167,7 milliards de FCFA en 2021, traduisant un soutien constant et croissant de l’Etat vis-à-vis des SPP. Or, ce même État, du moins ces dirigeants, évoquent en parlant d’elles, « de nombreux problèmes qui se posent par rapport à leur gouvernance, ainsi qu’à la maîtrise de la dépense publique en lien avec les transferts qui leurs sont dédiés ».
Restructuration des entreprises publiques, une variable d’ajustement
Comment donc expliquer qu’en dépit de la faiblesse de leur gouvernance et par ricochet de leur gestion, l’on décide d’engloutir une quinzaine de milliards de FCFA par an pour la restructuration de ces entreprises? PostBank, Octra, BGD, Sotravil, etc. Toutes ces entreprises, en plus d’avoir sonné la faillite économique de l’Etat continuent de lui ponctionner de gros sous pour leur liquidation, devenue un fonds de commerce. Heureusement d’ailleurs que l’actuel ministre de l’Économie et des Participations de l’Etat, Mays Mouissi s’est engagé à mettre fin à cette duperie. Comment expliquer qu’en cette délicate période de transition, l’on décide d’injecter 15 milliards de FCFA pour cette ligne budgétaire alors que l’urgence est à l’optimisation ?
La dette publique de notre pays devrait connaître une hausse conséquente durant cette période de transition (78,9% du PIB d’ici 2025), au cours de laquelle, a bien des égards, les fléaux qui gangrènent notre administration et nos salons feutrés depuis cinquante ans devraient être entretenus. L’épargne brute nationale devrait chuter à 35,7%, le PIB nominal devrait lui aussi chuter à 12893 milliards de FCFA contre 13118 milliards de FCFA l’an dernier. Il serait donc enfin temps de prendre le taureau par les cornes et effectuer ces nécessaires coupes budgétaires, pour permettre à notre économie de respirer.