Gabon : quid du devoir de réserve des agents publics ?
Au moment où le Gabon tente péniblement d’écrire des nouvelles pages de son histoire. Nous tenterons, à travers une série d’articles, d’attirer l’attention sur un certain nombre de pratiques qu’il convient de bannir car contraires à la loi.
En premier, il s’agit de l’attitude de certains agents publics, cadres de l’administration publique, qui confondent allègrement leurs activités politiques et professionnelles en assistant, voire en organisant des concertations politiques à large diffusion. Cette pratique est en parfaite contradiction avec leur devoir de réserve.
En effet, venant contrebalancer leur liberté d’expression, le devoir de réserve est une exception au principe général de liberté d’opinion des agents publics. Le devoir de réserve impose aux agents publics, en dehors de leurs fonctions, de faire preuve de retenue et de modération dans la manière dont ils expriment leurs opinions.
Deux critères permettent de caractériser l’atteinte au devoir de réserve. Il s’agit d’une part de la fonction de l’agent public et la publicité donnée aux propos d’autre part. Ainsi, si l’agent public occupe une fonction qui lui confère une autorité importante au sein de l’administration et que son propos (oral ou écrit) a une forte résonnance médiatique (repris par les principaux médias) l’exigence de modération est plus importante.
Ainsi, le directeur d’une administration publique qui participe voire qui organise, même sur son temps libre, des concertations politiques en faveur d’un dirigeant politique avec une importante couverture médiatique, porte une atteinte grave et manifeste à son devoir de réserve.
Il convient dès lors d’inviter la hiérarchie à faire respecter le droit et prendre les sanctions disciplinaires appropriées pour mettre un terme à ces pratiques qui n’honorent pas notre administration.
Toutefois, il faut distinguer le devoir de neutralité (d’origine législative) du devoir de réserve (d’origine jurisprudentielle). Le devoir de neutralité est l’autre versant du devoir de réserve en ce qu’il s’impose aux agents publics dans l’exercice de leurs fonctions. Le devoir de neutralité interdit aux agents publics de manifester, dans le cadre de leur travail, des opinions qui seraient de nature à faire douter de la neutralité du service public. Nous y reviendrons dans un prochain article.
Rodolphe Boussougou,
Président de l’association Droit pour tous