Gabon: la scène artistique condamnée à se déployer dans les débits de boissons
Laissés pour compte par l’État qui ne semble pas faire de l’art un vecteur de développement, les acteurs culturels semblent résolus à se tourner vers les « maquis ». En effet, ces espaces de loisirs sont devenus le seul moyen pour bon nombre d’artistes de joindre les deux bouts en cette période de crise sanitaire liée au covid-19 où le génie créateur est bradé contre des broutilles appelés « petits gombos ».
Dans l’attente d’une décision favorable dans le procès intenté contre le Bureau gabonais des droits d’auteur (Bugada), les artistes tirent le diable par la queue. Désireux de subsister durant cette période de vache maigre, des acteurs culturels se déploient davantage dans les terrasses de certains débits de boissons. Restaurants-bars et abords de plage, les rois et reines de la scène musicale y ont trouvé un champ d’expression.
Une situation de clochardisation de la part de leur ministère de tutelle qui contraint de nombreux artistes à se rabattre dans des débits de boisson pour vivre de leur passion. Ainsi, nombreuses sont les terrasses qui offrent leur espace afin de permettre aux acteurs culturels de performer. Notamment, certains débits de boissons qui organisent des évènements culturels hebdomadaires généralement les week-ends. Pourtant sous d’autres cieux, les concerts et spectacles ont repris avec comme condition sine qua none la vaccination. A cet effet, pourquoi ne pas s’inspirer de ce modèle pour relancer le secteur culturel?
Si de nombreuses mesures ont été allégées afin de permettre aux opérateurs économiques d’exercer, pour les artistes, il n’en est rien. Pire, pour le ministre de la Culture et des Arts, Michel Menga M’Essone, ces derniers seraient « dans l’informel ». Un manque de soutien des autorités aux artistes en ce temps de covid-19, alors que ces derniers portent très haut les couleurs du pays aussi bien sur le plan national qu’international.
Pourtant, l’Etat qui n’a jamais cessé de définir la Culture comme le socle du développement d’une Nation, « ce que sa population a en partage. Ce qui nous reste lorsque nous n’avons plus rien ». Mais entre les discours et les actes concrets, le fossé demeure bien trop grand et le constat est amer. Le secteur culturel se porte mal. L’absence d’une réelle politique d’accompagnement ou de la reconnaissance du statut d’artiste et la mise en place des droits d’auteur fait défaut. Conséquence, les acteurs ne parviennent toujours pas à profiter du fruit de leur art.
Avec 8,2 milliards prévues en 2022, gageons que la situation pourra s’améliorer et que les acteurs culturels seront mieux pris en compte. Mais pour l’heure, les artistes sont clochardisés et certains vivent dans des états précaires par manque de politiques d’accompagnement. Quand on sait que chaque année un budget est mis à disposition, on s’interroge sur l’utilisation qui en est faite si les principaux opérateurs économiques du secteur n’en bénéficient pas.
Aucune salle de spectacle, aucun festival, aucune rémunération. Une situation qui a poussé l’Association gabonaise des artistes et la Corporation des artistes réunis, à décider d’introduire un recours auprès du Tribunal de première instance de Libreville dans cette affaire portant paiement de la redevance des droits d’auteur.