Gabon : la question de l’allocation chômage toujours pas à l’ordre du jour
La situation du chômage au Gabon est chaotique. La problématique est particulièrement cruciale chez les jeunes. Son taux dépasse les 40%. Malgré l’immensité de ses ressources naturelles qui génèrent près de 50% de ses revenus, le Gabon n’a pas réussi à transformer ses richesses issues de l’extraction pétrolière en emplois pérennes. Les jeunes et les femmes, notamment, sont donc de plus en plus désœuvrés, et le gouvernement peine à trouver des solutions. A titre d’exemple, le pays ne dispose toujours pas d’une allocation chômage pourtant promise depuis 2017.
Le Gabon ne parvient pas à intégrer sur son marché du travail les milliers de jeunes qui y arrivent chaque année. Il n’y a toujours pas d’indemnité chômage et le Code du travail actuel semble ne profiter qu’aux entreprises. C’est un fait. Pourtant, dans l’optique de lutter contre la pauvreté et l’affaiblissement du pouvoir d’achat qui s’est renforcé depuis quelques années, les autorités gabonaises, sous Ali Bongo notamment, avaient mis sur pied une allocation chômage, contenue dans le code de Sécurité sociale adopté en 2017.
Cette disposition devait permettre, entre autres, la création d’un compte d’épargne chômeur ainsi que d’un fonds de solidarité et d’activation de l’emploi. Sept ans plus tard, il n’en est rien. La question reste pendante. Pourtant, dès son arrivée au pouvoir en septembre dernier, le président de la transition annonçait le rétablissement de la bourse au secondaire. Une initiative coûteuse puisqu’elle représente pas moins de 12 milliards de FCFA par an. Or, cette mesure n’a et n’aura, dans le futur, que peu d’impact sur le niveau de vie des populations, contrairement à une allocation chômage.
Sécurité économique, valorisation de l’homme, incitation à la recherche d’emplois
En effet, comparativement au retour des bourses au secondaire qui n’avait rien d’urgent, encore moins de nécessaire eu égard au contexte économique ponctué par des déséquilibres budgétaires criants, l’introduction d’une allocation chômage comme ce devait être le cas depuis au moins sept ans, pouvait avoir un impact positif à plusieurs niveaux. D’abord, du point de vue de la sécurité économique, elle aurait le mérite de réduire le stress financier aussi bien pour les travailleurs qui perdent leur emploi que pour ceux qui en sont à la recherche, tout en les aidant à maintenir un niveau de vie décent.
Ensuite, sur le plan économique, les bénéficiaires de l’allocation chômage obtiendraient un revenu régulier à dépenser, aussi minime soit-il, ce qui stimulerait la demande intérieure et soutiendrait l’économie locale, contrairement aux différentes mercuriales qui au final, au regard des 12 milliards de FCFA que représentent les subventions à la vie chère, n’ont pour conséquence que d’enrichir les opérateurs économiques. Ajouté à celà, le renforcement du filet de sécurité financière, la réduction de la pauvreté dont le taux de personnes vivant en dessous du seuil frise les 40% en 2023, c’est toute une frange de la population qui serait soulagée.
Annoncée à l’époque en accord avec la « volonté affirmée de chef de l’Etat gabonais Ali Bongo de réduire la pauvreté » et portée par Paul Biyoghe Mba, fidèle parmi les fidèles du régime Bongo et proche de l’actuel régime militaire, la mise en place de l’allocation chômage serait donc largement en mesure de résoudre la double problématique du chômage et de la pauvreté, contrairement aux mesures populistes actuelles qui tendent à fragiliser un peu plus une économie gabonaise déjà sous pression. Quand on sait que des programmes d’allocation chômage peuvent inclure des mesures de formation et de reconversion professionnelle, cette mesure bien conçue aurait même permis de réduire la fracture de l’adéquation formation-emploi. Hélas, la question de l’allocation chômage n’est toujours pas à l’ordre du jour.
“(…)aussi bien pour les travailleurs qui perdent leur emploi que pour ceux qui en sont à la recherche…” C’est ici que se trouve l’amalgame. Si le terme chômage est approprié pour les premiers, il n’en va plus de même pour les second. Certes, le chômeur est un sans emploi, mais pas au même titre que celui qui cherche un premier emploi!
Mais la vrai question est qui paye ou comment on finance cela et selon quels mécanismes? Si pour les premiers on peut légitimement penser à un “compte-épargne emploi” c’est-à-dire que les travailleurs financeraient eux-mêmes cet outil; les seconds ne semblent pas remplir ce critère puisqu’ils sont confinés à la recherche d’un …premier emploi.
Il faut donc pour ceux-là, penser à d’autres mécanismes, différents d’une allocation chômage, comme un ‘revenu minimum d’insertion” (on ne va pas réinventer la roue!), une “allocation minimale universelle” dont les mécanismes de financement seraient tout aussi spécifiques.
Bien à vous!