Afrobarometer : une jeunesse très instruite… mais 50 % au chômage
Alors que le Gabon affiche l’un des taux de scolarisation les plus élevés d’Afrique centrale, la moitié des jeunes reste sans emploi. Une contradiction majeure révélée par Afrobarometer, qui montre que l’école gabonaise produit des diplômés… mais pas les compétences attendues sur le marché du travail.
Les données d’Afrobarometer publiées le 13 novembre 2025 confirment une réalité que les familles gabonaises ressentent quotidiennement : jamais la jeunesse gabonaise n’a été aussi instruite, et pourtant, jamais elle n’a été aussi massivement touchée par le chômage. Selon l’enquête, plus de 50 % des jeunes de 18 à 35 ans se déclarent sans emploi, tandis que 63 % en font la première priorité nationale.
Cette contradiction soulève une question fondamentale : comment un pays qui investit massivement dans l’éducation se retrouve-t-il incapable de transformer ce capital humain en opportunités professionnelles ?
Un système scolaire déconnecté du réel économique
Deux chiffres résument le paradoxe gabonais : plus de 80 % des jeunes ont atteint le secondaire ou le supérieur ; pourtant, seul 1 jeune sur 2 trouve un emploi, et souvent dans le secteur informel.
Le rapport d’Afrobarometer est sans équivoque : les compétences produites par l’école gabonaise ne correspondent pas aux besoins du marché. Entre les filières sursaturées (droit, gestion, communication) et l’absence de formations techniques adaptées (énergie, numérique, agriculture moderne, métiers industriels), le fossé se creuse. Le système éducatif forme, certes, mais il ne prépare pas.
Des diplômés qui ne trouvent pas leur place
Ce désajustement se manifeste de manière criante dans trois domaines clés : la formation technique et professionnelle, sous-financée et dévalorisée, incapable de répondre aux besoins industriels du pays, les compétences numériques, très peu développées, alors que les entreprises réclament des profils qualifiés dans la data, la cybersécurité ou la maintenance informatique et l’entrepreneuriat, largement promu par les discours politiques, mais freiné par l’absence d’accompagnement financier, administratif et fiscal.
Résultat : le Gabon fabrique des cohortes de diplômés brillants… qui n’ont pas accès aux secteurs où se créent les emplois.
Le marché du travail réclame des compétences que l’école ne produit pas
Les attentes des employeurs – compétences pratiques, savoir-faire technique, polyvalence, culture numérique – ne trouvent presque jamais écho dans les trajectoires scolaires. Afrobarometer note que malgré une forte volonté de travailler, la majorité des jeunes se retrouve « mal préparée » ou « inadéquatement formée ».
Dans les entreprises, un discours revient avec insistance : « les jeunes sont diplômés, mais pas opérationnels ». Une formule injuste pour certains, mais révélatrice d’un malaise structurel.
Le test ultime pour le gouvernement Oligui Nguema
En plaçant l’emploi en tête de leurs préoccupations, les jeunes gabonais envoient au gouvernement un message clair : la rupture du 30 août ne sera crédible que si elle crée des opportunités réelles.
Trois chantiers s’imposent : Réformer en profondeur l’enseignement technique et professionnel ; Aligner les formations supérieures avec les besoins stratégiques (agro-industrie, énergie, numérique, santé) ; Créer un écosystème entrepreneurial moderne, simple et financé. Car sans transformation du modèle éducatif, aucune politique de l’emploi ne tiendra.
Un paradoxe qui peut devenir une force
Le Gabon n’est pas condamné à ce déséquilibre. Une jeunesse instruite est un avantage stratégique rare sur le continent. Mais si elle reste exclue du marché de l’emploi, elle deviendra une source d’instabilité sociale et politique. L’heure n’est donc plus au constat, mais à l’action.
Le paradoxe gabonais peut devenir un atout… si le pays parvient enfin à faire coïncider formation, compétences et opportunités.








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